Article engagé à lire sur Agoravox :

Fainéant par nature, je dois dire que je n’ai pas l’habitude d’écrire deux articles dans la même journée. Surtout en ces temps de nuit brune et qui n’en finit pas. Je préfère aller au bistrot et boire comme mes concitoyens. Boire plutôt que d’écrire. Même si j’aime beaucoup écrire. Parce qu’écrire ça demande de réfléchir. Et en ce moment réfléchir, ça me fait mal. Ca fait me fait honte… J’en ai marre d’avoir honte. Marre d’avoir mal. J’ai pourtant eu 3 opérations à cœur ouvert. C’est dire si je sais ce que c’est que d’avoir mal. Si j’ai perdu l’habitude de me plaindre. Mais je n’ai jamais eu autant mal au ventre que depuis que Sarkozy est passé. Je suis un citoyen et mon devoir premier c’est de mordre la pomme de la Liberté. Putain de pomme empoisonnée. La liberté est véreuse si tes frangins ne te sont pas tous égaux.

Aujourd’hui pourtant tout allait bien. C’était jour de cessez-le-feu à Gaza. Le monde s’est enfin décidé de demander à l’armée israélienne de se calmer et de laisser un peu les gosses respirer sous les bombes. Seulement voilà, une nouvelle m’est tombée sur le coin de la gueule comme un pavé perdu : « Williana 12 ans est en prison ». Comment ? Pardon ? Quoi ? Qu’est-ce ? Ai-je bien lu ? Pour tous ceux qui ont la même réaction que moi la première fois, je répète : « Williana, 12 ans est en prison ». Mais… heu… où ça ? A Gaza ? En Turquie ? En Russie ? En Chine ? Non, non. Williana, 12 ans, est en prison. Ici. En France. A Paris, capitale mondiale de la culture. La ville de l’Amour, des Lumières. En France, le pays de la liberté. En France, quoi ! Bordel ! Réveille toi ! Secoue toi ! Oui, ici ! En France ! A côté de chez toi ! Ou presque… à Orly.

La suite à lire ici… 

Retour sur la crise actuelle…

Banques zombies et retour du culte du Vaudou, par Paul Krugman

21 janvier 2009 – La valeur boursière de certaines banques est aujourd’hui inférieure au total des aides de l’Etat qu’elle ont reçues, et pourtant l’apurement des livres de comptes est loin d’être achevé. A Washington, on semble envisager la création d’un établissement public destiné à débarrasser les établissements de leurs actifs pourris, aux frais du contribuable. Krugman s’insurge contre ce projet. Il reviendrait, dit-il à subventionner à nouveau des banques en état de mort clinique, mais ne garantirait pas pour autant leur assainissement. Ces montages incertains n’ont pour lui qu’une seule raison d’être : éviter à tout prix une nationalisation pourtant inévitable. Krugman le didactique nous explique pourquoi, à l’aide de l’exemple de la « Gotham Bank », inventée pour l’occasion.

A lire sur Contreinfo.

Roubini : les pertes peuvent atteindre 3600 milliards, le système bancaire US est virtuellement en faillite

21 janvier 2009 – Wall Street, combien de zombies ? Combien d’établissements seraient aujourd’hui en faillite sans l’apport répété de liquidités et les facilités mises en place par la Fed, qui leur permettent de continuer à exister alors que leur valeur liquidative est vraisemblablement largement dans le rouge ? Roubini estime que les pertes de l’ensemble du système financier US pourraient s’élever jusqu’à 3600 milliards, dont une moitié pour les banques. Or leur capitalisation agrégée n’est que 1400 milliards. Conclusion ? Le système bancaire US est virtuellement en faillite, avertit Roubini. Faut-il s’en étonner puisque les USA sont à l’épicentre de cette explosion de la bulle d’actifs douteux et de dettes irrécouvrables ? Mais les mêmes causes produisant les mêmes effets, Il n’y a pas lieu de croire que l’Europe serait à l’abri. La situation est la même de ce côté-ci de l’Atlantique, avertit Roubini, et les déboires récents des banques anglaises sont là pour confirmer ses dires.

A lire sur Contreinfo.

Evans-Pritchard : de sérieuses inquiétudes pour la Livre Sterling

21 janvier 2009 – Les mesures décidées en urgence à l’automne pour sauver les banques ont mis un terme à la panique. Mais elles n’ont pas résolu le problème pour autant. Elle l’ont simplement déplacé. Car des pans entiers du système bancaire sont virtuellement en faillite. A titre d’exemple, Roubini vient de chiffrer à 3 600 milliards le montant que pourraient atteindre les pertes aux USA, alors que la capitalisation totale des banques n’est que de 1400 milliards. Dans cette nouvelle phase, la question auxquels les Etats sont confrontés n’est plus le « too big to fail », mais « too big to save ». Lorsque les bilans des établissements pèsent plusieurs fois le PIB de la nation, aucune autorité ne dispose évidemment des fonds nécessaires pour éponger les pertes. Les seules solutions sont donc l’émission monétaire et/ou la dette. Les USA, forts du statut de monnaie de réserve du dollar, ont pu se permettre jusqu’à présent ces deux expédients sans en souffrir, personne n’ayant intérêt à une dévaluation du dollar qui provoquerait un raz de marée planétaire sur les réserves et les patrimoines. La Grande Bretagne, fière jusqu’à présent du rôle de « hub » de la mondialisation financière qui était le sien, ne dispose évidemment pas du même crédit que les USA. Et les craquements répétés ces derniers jours de son système bancaire affaiblissent la Livre. Mais elle est en plus confrontée à un danger bien spécifique : ses établissements sont massivement endettés en devise étrangère, à hauteur de 4400 milliards de dollars. Et là, la planche à billet de Sa Majesté n’y peut mais. Nos lecteurs connaissent Ambrose Evans-Pritchard et son penchant à la dramatisation. Mais les inquiétudes qu’il exprime ici ne sont pas surjouées. Le Royaume Uni traverse effectivement une passe fort délicate.

A lire sur Contreinfo.

Mais sa conlusion est subtile :

Les baby-boomers ont eu leur heure de pouvoir. La génération la plus gâtée de l’histoire a géré les affaires avec l’hédonisme qui la caractérise. Les conséquences sont encore à venir.

Pauvres idiots.

Le Sarkothon 2009
Par Jacques Drillon et Fabrice Pliskin sur Bibliobs.com

Le 28 janvier, Nicolas Sarkozy aura 54 ans, et il souffre d’une maladie, l’allergie à la littérature. C’est pourquoi nous lançons une grande opération thérapeutique: redonner le goût de la lecture à l’ennemi personnel de Mme de La Fayette

Monsieur le Président,

Serait-ce à force d’admirer les chiffres sur le cadran de votre Breitling que vous avez pris les lettres en horreur? Vous nous rappelez sans cesse que le but de notre vie, c’est de gagner plus. Hélas, sous votre présidence, les Français n’ont plus d’argent. Des «cinq ou six cerveaux» que vous prête votre moitié, aucun ne semble stimulé par la chose écrite. La chose comptée vous importe seule, et il n’est pas jusqu’aux sans-papiers, êtres humains parmi les êtres humains, que vous ne dénombriez par paquets de mille. Un texte, semblez-vous demander, combien de divisions? Les richesses d’un livre, la multiplicité des tons et des voix sont lettre morte pour vous. Pourquoi reconduire à la frontière de votre conscience cette diversité-là?

s1-300x196 Envoyez un livre au président de la République! Vous nous souhaitez bonne année dans la bibliothèque de l’Elysée, mais ses livres trop bien rangés montrent assez que vous n’en avez lu aucun ; vous aimez à vous parer d’Aimé Césaire et de Claude Lévi-Strauss comme d’un people et d’un top model, et tout le monde sent bien que c’est pour le show et la chanson. Après cela, étonnez-vous, Monsieur le Président, qu’on aille vous classer dans la variét’. Et si, au lieu de «faire du chiffre», vous faisiez des lettres? D’où le Sarkothon 2009.

En guidant vos lectures, nous voudrions tempérer un peu votre «fureur d’accumuler», comme dit La Fontaine, et vous redonner le goût de notre patrie, de sa grandeur spirituelle et de son histoire littéraire. Puissent ces quelques ouvrages favoriser votre retour au pays natal.

« Surveiller et punir » de Michel Foucault (Gallimard)

• 17 novembre 2008: un maître-chien, accompagné de quatre gendarmes, lâche son molosse dans les classes de l’Ecole des Métiers du Gers à la recherche d’une substance illicite. 19 novembre : deux gendarmes lâchent un chien renifleur sans muselière dans une classe de troisième d’un collège de Marciac.

Le hussard noir de votre République, c’est donc le chien. Un maître idéal. On se lève quand il entre dans la classe. Avec un pareil pédagogue, nul besoin d’IUFM. Presque aussi servile que Xavier Bertrand, il a, comme Rachida Dati, ce «bon sens» si bien partagé qui consiste à emprisonner des mineurs de 12 ans. Et puis nulle lecture dangereuse ne parasite son pur esprit. Ce chien n’est pas homme à vous assommer avec un volume de Marcel Proust. Monsieur le Président, pour apaiser votre élan rintintinesque et sécuritaire, laissez-nous vous recommander très respectueusement «Surveiller et punir», un ouvrage où Michel Foucault déjoue les stratégies de criminalisation et d’enfermement. Parce que «l’école du respect» n’est pas l’école des chiens. Et parce que cette lecture vous changera de la conversation de Patrick Balkany.


« Le Rire » de Bergson (PUF)

• «Il faut passer d’une politique défensive à une politique offensive en matière de diversité culturelle et de rayonnement de la culture française à l’étranger. » (Nicolas Sarkozy, à la convention UMP, janvier 2006.)

s2 Envoyez un livre au président de la République! Nous voudrions attirer votre attention sur ce que vous appeliez, à l’époque heureuse où vous n’étiez que candidat, une «politique offensive»: un rapport sénatorial indique que l’on est passé de 173 centres culturels français en 1996 à 144 en 2008. Près de 30 antennes françaises à l’étranger rayées de la carte: ce n’est pas de l’offensive, mais de l’offense – à la langue, à la culture, au patrimoine français. Et nous passons, de peur de vous gêner, sur la promesse non tenue. L’image de la France, qui se ternit à chacun de vos déplacements à l’étranger (Grande-Bretagne, Vatican, Chine, Inde, Etats-Unis), se rétrécit à la même vitesse. Il est vrai que votre idée de la culture, qui se fonde sur le prestige médiatique de quelques amuseurs, ne s’exporterait guère. Il fut un temps où l’on envoyait un philosophe, Henri Bergson, auprès du président Wilson pour le convaincre d’entrer en guerre contre l’Allemagne. Vous y auriez envoyé Christian Clavier ou Bernard Tapie, l’Oscar de la gauche. Nous vous offrons donc «le Rire» de Bergson. Cadeau diplomatique.


«La Culture générale pour les nuls»
de Florence Braunstein et Jean-François Pépin (Editions First)

• André Santini, secrétaire d’Etat à la Fonction publique, a annoncé, en décembre 2008, qu’il projetait de supprimer les épreuves de culture générale aux concours administratifs pour les remplacer par des «questions de bon sens».

Un serviteur de la République n’a que faire d’être un citoyen, de connaître des babioles comme la théorie de l’évolution, l’Immaculée Conception, la nuit du 4-Août ou Tartuffe. Sans doute cette idée s’inscrit-elle dans ce que vous appelez si drôlement «notre Renaissance intellectuelle, artistique et morale». Trêve de plaisanterie, Monsieur le Président, vous savez ce qu’est la Renaissance. Cela relève-t-il de votre bon sens ou de votre culture générale? On peut être bonapartiste, autocrate, ennemi de la liberté de la presse, et n’en défendre pas moins les humanités. Voyez Napoléon, qui dévorait Corneille et Racine. Il nous semble que vous sous-estimez les bienfaits de la culture générale, cette discipline où vous êtes passé maître et qui permet aux plus hautes autorités de l’Etat d’invoquer à tort et à travers les Lumières ou Jaurès. La pratique régulière de «la Culture générale pour les nuls» saura vous y convertir.


« L’Age d’or » de Pierre Herbart (Le Dilettante)

• «On peut aimer Céline sans être antisémite comme on peut aimer Proust sans être homosexuel.» (Nicolas Sarkozy, lors d’une conférence de presse en Inde, le 29 janvier 2008.)

s3 Envoyez un livre au président de la République! En somme, vous assimilez l’homosexualité à une doctrine raciste. Justement, les antisémites nazis mettaient les homosexuels dans les mêmes chambres à gaz que les juifs. Vous le saviez, pourquoi feindre de l’ignorer? Parce qu’au fond les homosexuels, pour vous, c’est folles, fiottes et compagnie. Mais vous ne pouvez pas le dire tout haut. Alors votre inconscient a parlé pour vous. Votre conscient aussi le fait parfois. «Je suis né hétérosexuel», avez-vous dit le 5 février 2007 sur TF1. Il n’y a pas de quoi être fier. On en a connu de peu ragoûtants, des hétérosexuels. Et puis qui sait ce que nous réserve l’avenir?

Vous ne seriez pas le premier à changer de cap en cours de route. Mais vous avez raison : Proust, si ce n’est pas de la littérature pour les pédés, c’est de la littérature de pédé, au singulier. Même si, comme vous, il se prétendait hétérosexuel-né. Nous vous offrons donc non pas du Proust, mais un des plus beaux livres d’amour qu’on ait jamais écrits, «l’Age d’or» de Pierre Herbart, «un livre, disait Jacques Brenner, qu’on ne voudrait mettre qu’entre des mains nettes». Nous prenons ce risque.


« La République » de Platon et « la Guerre des Gaules » de César (Les Belles Lettres)

• «Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne.» (Nicolas Sarkozy, le 16 avril 2007.)

Vous n’aimez pas, n’est-ce pas, le latin et le grec? Cela coûte cher, cela ne sert à rien, il n’y a pas de débouchés. Vous êtes le premier président de la Ve République à le dire. Le premier à ne pas avoir honte de le penser. Ce que nous serions, sans Rome et sans Athènes, n’est pas votre souci. Le latin, le grec, oublions tout cela; faisons de l’informatique. «L’Etat n’est pas obligé de financer les filières qui conduisent au chômage», disiez-vous ce jour-là. Vous avez bien raison: les 20 millions de chômeurs supplémentaires que Juan Somavia, directeur général du Bureau international du Travail, prévoit pour 2009 ont manifestement gâché leur belle jeunesse à traduire Juvénal et Euripide. Même les hellénistes et les latinistes de chez Lehman Brothers n’ont plus de job. Bien fait pour ces bénédictins.
Plongez dans «la Guerre des Gaules» de votre collègue César (Jules); et, pour le grec, «la République», parce que Platon y décrit un pays où, pour reprendre une expression qui vous est chère, les artistes et poètes, chômeurs professionnels, « n’ont pas vocation » à vivre.


« La Princesse de Clèves » de Mme de La Fayette (Hatier)

• «L’autre jour, je m’amusais à regarder le programme du concours d’attaché d’administration. Un sadique ou un imbécile avait mis dans le programme d’interroger les concurrents sur “la Princesse de Clèves”. Je ne sais pas si cela vous est souvent arrivé de demander à la guichetière ce qu’elle pensait de “la Princesse de Clèves”.» (Nicolas Sarkozy, février 2006.)

s4 Envoyez un livre au président de la République! Que votre volonté soit faite, Monsieur le Président. Du passé faisons table rase. Kärchérisons toutes les fables qui façonnent notre grand récit national. Haro sur les «sadiques» et les «imbéciles». Vive les nihilistes! Discréditons l’effort, l’exigence, la subtilité. Claquons la porte des grands textes au nez de la petite guichetière. Vive notre président pilon! Gloire à l’autodafé d’Etat!

Et disons à Mme de La Fayette, cette sœur spirituelle de Corneille: «Casse-toi, pauvre c…» «La Princesse de Clèves»? «J’ai beaucoup souffert par elle», avez-vous déclaré, en juillet 2007. Dans la peur d’être accusés de torture par Amnesty International, nous vous en adressons, non le texte intégral, mais le «Profil d’une œuvre». En vous souhaitant une prompte résilience.


Jacques Drillon et Fabrice Pliskin


s5 Envoyez un livre au président de la République! VOUS AUSSI, donnez au SARKOTHON

VOUS AVEZ DES LIVRES, Nicolas Sarkozy n’en a pas.
Vous les avez lus, pas lui. Soyez solidaires et citoyens: offrez un livre à notre président!
AGISSEZ maintenant pour vivre mieux demain.
Faites un choix judicieux et utile. Et un beau paquet.
N’OUBLIEZ PAS d’inscrire sur votre envoi :
«Sarkothon 2009 du Nouvel Observateur».
Adressez-le à: Monsieur le Président de la République, 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré, 75008 Paris.
Un petit mot d’accompagnement n’est pas superflu. L’anniversaire du président ne se fête qu’une fois par an.

Source: Le Nouvel Observateur, 22/1/09.

Ayant assisté à une conférence de Stéphane Hessel, je poste quelques informations sur une de ces consciences du siècle qui nous sont précieuses.

stephane-hessel2-215x300 Stephane HesselStéphane Frédéric Hessel (né à Berlin le 20 octobre 1917) est un diplomate, ambassadeur et ancien résistant français.

Il est le fils d’un père, Franz, membre de la grande bourgeoisie juive polonaise émigrée en Allemagne et ayant fait fortune dans le commerce des grains, partiellement convertie au protestantisme luthérien, et d’une mère, Helen Grund, fille d’un banquier prussien et protestant. Son père, dès son plus jeune âge, se voue aux lettres, aux langues et à l’Antiquité grecque. Sa mère, qui dessine et peint, notamment, est l’héroïne de Jules et Jim, le fameux roman de Henri-Pierre Roché, l’ami de son père (qui sera « illustré » au cinéma par François Truffaut).

Immigré en France en 1925 avec sa mère, bachelier à 15 ans, reçu à l’Ecole Normale supérieure et naturalisé français en 1937, mobilisé en 1939 à Saint-Maixent, avec trois promotions de normaliens. prisonnier évadé en 1940, il rejoint le général De Gaulle à Londres en mai 1941.

Engagé dans les Forces aériennes françaises libres il obtient, en mars 1942, la qualification d’air observer (navigateur sur bombardier) mais c’est dans le Bureau de contre-espionnage, de renseignement et d’action (BCRA), section R, chargé d’informer l’état-major britannique, qu’il entre. En mars 1944 il est envoyé en France pour une mission de cents jours (la mission Greco). Le 10 juillet 1944 il est arrêté par la Gestapo et envoyé à Buchenwald en août où, en novembre, il bénéficie d’un complot qui lui permet d’être chef comptable au camp de Rottleberode. En janvier 1945 sa tentative d’évasion ayant échouée il est envoyé à Dora, le camp où sont fabriqués les V-1 et V-2. Le 4 avril il s’évade et rejoint les américains. Il est à Paris le 8 mai 1945.

Admis, en novembre 1945, au concours des Affaires Etrangères, Stéphane Hessel fait toute sa carrière, jusqu’en 1985, dans la diplomatie, tout en étant, sous la IVème République l’un des proches collaborateurs de Pierre Mendes-France, connu à Londres en 1943, et admiré.

Après la guerre, il devient ambassadeur de France à l’ONU, puis occupe divers postes de diplomate à Saïgon, Alger, Genève et New York et se consacre inlassablement à la défense des droits de l’Homme.

En 1948, Stéphane Hessel participe à la rédaction de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (que vous pouvez lire et relire ici) aux côtés entre autres de René Cassin, en sa qualité de chef de cabinet de Henri Laugier, secrétaire général adjoint de l’ONU et secrétaire de la Commission des droits de l’Homme. Il a été membre du cabinet Pierre-Mendès France.

Souvent interrogé sur son parcours personnel et sur les raisons qui l’ont poussé, après 1945, à s’engager dans la carrière diplomatique, l’ambassadeur Hessel atteste que l’expérience de la déportation a été décisive. C’est en effet dans les camps qu’il a rencontré des opposants européens au nazisme issus de différentes nationalités européennes et qu’il a compris que ces forces européennes devaient s’unir à l’avenir pour prévenir de telles catastrophes.

En 1962, il crée l’AFTAM (Association de formation des travailleurs africains et malgaches) dont il devient président. En 2008, l’AFTAM compte 22 000 lits d’hébergement.

Cet européen convaincu est le vice-président du Collégium international éthique, politique et scientifique

Stéphane Hessel demeure à l’âge de quatre-vingt-onze ans, ambassadeur de France. Sur proposition de Bernard Kouchner, Stéphane Hessel a accepté d’être le grand témoin des célébrations du 60ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.

Il décrit son parcours dans son dernier livre Citoyen sans frontières (Fayard).

Vous pouvez le lire sur le site de La Vie, de la Ligue des droits de l’homme ou de Ressources pour la paix.

Je termine enfin par quelques interviews passionnantes.

Retour à la triste réalité… Bilan de l’opération israélienne à Gaza :

gaza-morts Gaza : suite et fin (provisoire...)L’offensive de l’armée israélienne contre le Hamas dans la bande de Gaza a fait 1 330 morts palestiniens et 5 450 blessés, selon le dernier bilan des services médicaux palestiniens. Parmi les morts figurent 437 enfants âgés de moins de 16 ans, 110 femmes et 123 personnes âgées, ainsi que 14 médecins et quatre journalistes, a précisé le chef des services d’urgence à Gaza, Mouawiya Hassanein.

L’offensive de 22 jours (27 décembre-17 janvier) a fait 1 890 blessés parmi les enfants, et 200 blessés graves tous âges confondus.

Six cents blessés ont par ailleurs été transférés hors de la bande de Gaza pour recevoir des soins.

L’opération militaire a été lancée par Israël avec l’objectif affiché de mettre fin aux tirs de roquettes par les groupes armés palestiniens, notamment le Hamas, contre son territoire. L’armée israélienne s’est retirée mercredi de la bande de Gaza contrôlée par les islamistes du Hamas.

Côté israélien, 10 militaires et 3 civils ont été tués, selon les chiffres officiels.

Je sais que je vais lasser mon lectorat, mais bon, il faut bien tangibiliser ces morts…

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Une croix = 1 mort palestinien = une vie brisée = une famille en deuil = X futurs kamikazes.

Pour les soldats israéliens, on a plus brièvement :

* * * * * * * * * * (cool la guerre maintenant !)

Bien entendu, le problème est résolu (ou presque) :

Le gouvernement du Hamas a Gaza a annoncé jeudi 22 janvier qu’il verserait 1 000 euros à la famille de chaque Palestinien tué lors de l’offensive à Gaza et 4 000 euros pour chaque maison entièrement détruite. »A partir de dimanche, le gouvernement va commencer à verser 4 000 euros aux propriétaires des maisons entièrement détruites, 2 000 euros pour celles partiellement détruites, 1 000 euros à la famille de chaque martyr et 500 euros à chaque blessé », a déclaré lors d’une conférence de presse le porte-parole du gouvernement islamiste Taher Al-Nounou.

Le montant total des compensations aux pertes humaines et destructions enregistrées à Gaza pendant 22 jours d’offensive israélienne sera d’entre « 35 à 40 millions de dollars », a-t-il ajouté.
L’offensive de l’armée israélienne contre le Hamas dans la bande de Gaza a fait 1 330 morts palestiniens et 5 450 blessés, selon le dernier bilan des services médicaux palestiniens rendu public jeudi.
Quelque 4.000 maisons ont été entièrement détruites dans les attaques israéliennes et plus de 17 000 autres ont été endommagées, selon une estimation du bureau central des statistiques de l’Autorité palestinienne.

Alors forcément… :

gaza-detruite Gaza : suite et fin (provisoire...)Le coordinateur humanitaire de l’ONU John Holmes a estimé vendredi 23 janvier à Jérusalem que la communauté internationale allait devoir verser « plusieurs centaines de millions de dollars » pour répondre aux besoins les plus urgents des Palestiniens de la bande de Gaza.

« Le niveau de destruction, que j’imaginais élevé, était encore pire que ce que j’attendais », a déclaré lors d’une conférence de presse John Holmes, qui s’est rendu jeudi dans la bande de Gaza, cible d’une offensive israélienne qui a duré de 22 jours.

Il a également qualifié de « très choquant«  le bilan humain de l’offensive qui a fait, selon les services de secours palestiniens, plus de 1 300 morts et plus de 5 000 blessés.

John Holmes a précisé que l’ONU lancerait « début février » un appel à des fonds internationaux pour répondre aux besoins humanitaires les plus urgents.« Je ne peux pas encore dire à combien s’élèvera cet appel en détail, mais je suis sûr qu’il portera sur des centaines de millions de dollars pour répondre aux besoins pour les six ou neuf prochains mois ».

Pour John Holmes, les besoins les plus urgents portent sur les biens alimentaires, l’eau portable, le carburant et la réparation de l’infrastructure électrique, ainsi que l’aide aux personnes déplacées, dont le nombre est évalué à au moins 100 000.« Les besoins sont considérables pour les prochains mois », a-t-il insisté.

Notez que je vous épargne des petites croix pour les 100 000 déplacés…

gaza1 Gaza : suite et fin (provisoire...)Pour le rapporteur spécial de l’ONU pour les territoires palestiniens, Richard Falk, les opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza ont eu un « caractère sans aucun doute inhumain » qui évoque « le spectre de crimes de guerre systématiques ». C’est ce qu’il a affirmé, jeudi 22 janvier, depuis la Californie, lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes à Genève.

« Des cibles illégales ont été sélectionnées », a estimé, Richard Falk parlant d' »intention criminelle ». « Il n’y a aucun doute sur le caractère inhumain d’une opération militaire à grande échelle du type de celle qu’Israël a engagé le 27 décembre contre une population essentiellement sans défense« , a-t-il poursuivi.

L’armée et le gouvernement israéliens ont, pour leur part, déclaré à de maintes reprises qu’ils ne visaient jamais délibérément des civils pendant leurs opérations dans la bande de Gaza, lancées pour mettre fin aux tirs de roquettes et de missiles, notamment du mouvement islamiste Hamas, sur des villes du sud d’Israël.

Selon le rapporteur de l’ONU, l’opération militaire israélienne « évoque le spectre de crimes de guerre systématiques« .

Rappelant que l’opération israélienne avait été menée contre un territoire densément peuplé, avec une population affaiblie par les privations de 18 mois de blocus et « prise au piège » dans la zone de guerre, Richard Falk a dénoncé le confinement « dans la zone de guerre active » de la population. Empêchée de s’enfuir, elle s’est trouvée dans l’impossibilité d’accéder à la protection du statut de réfugié, a-t-il souligné. « C’est sans précédent », a-t-il affirmé. « Aucun enfant, aucune femme, aucun malade ou handicapé de la population de Gaza n’a été autorisé à quitter la zone de guerre« , s’est-il indigné.

La frontière entre Israël et la bande de Gaza a été fermée pendant le conflit. L’Egypte a également maintenue fermée sa frontière avec la bande de Gaza

« Les preuves de violations des règles fondamentales du droit international humanitaire sont si accablantes qu’elles doivent faire l’objet d’une enquête internationale indépendante », a jugé le juriste américain.

Les violations du droit international commises par le Hamas en lançant des roquettes sur Israël ne sont pas comparables, a estimé le rapporteur de l’ONU, qui est la bête noire du gouvernement israélien.

Richard Falk a été refoulé le 14 décembre par les autorités à son entrée en Israël, d’où il devait se rendre dans les territoires palestiniens. Il avait déjà déclaré que la politique d’Israël à l’encontre des populations des territoires s’assimilait à « un crime contre l’humanité ».

Ce refoulement « sans précédent » de Richard Falk, retenu durant plus de 20 heures à l’aéroport Ben Gourion de Tel Aviv, avait été dénoncé par la Haut commissaire de l’ONU pour les droits de l’homme Navi Pillay.

Source : NouvelObs.com

Nous terminerons par un extrait de la retranscription réalisée par l’indispensable site Contreinfo de propos de cette grande âme universelle qu’est Stéphane Hessel, 91 ans, diplomate, ambassadeur, ancien résistant et déporté français, qui a notamment participé à la rédaction de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 :

stephane-hessel Gaza : suite et fin (provisoire...)Stéphane Hessel s’entretient avec Swiss Info, 5 janvier 2009

Stéphane Hessel : En réalité, le mot qui s’applique – qui devrait s’appliquer – est celui de crime de guerre et même de crime contre l’humanité. Mais il faut prononcer ce mot avec précaution, surtout lorsqu’on est à Genève, le lieu où siège un haut commissaire pour les Droits de l’Homme, qui peut avoir là-dessus une opinion importante.

Pour ma part, ayant été à Gaza, ayant vu les camps de réfugiés avec des milliers d’enfants, la façon dont ils sont bombardés m’apparaît comme un véritable crime contre l’humanité.

Ce terme, vous osez le prononcer ? C’est la disproportion qui vous choque, entre les roquettes palestiniennes et une offensive terrestre massive ?

C’est l’ensemble du comportement. C’est naturellement la disproportion, vous avez raison de le souligner…Une terre densément peuplée, la plus dense du monde probablement, sur laquelle on frappe avec des instruments militaires qui ne peuvent pas faire la différence entre les militaires et les civils. D’ailleurs il n’y a pas de militaires, il n’y a que des civils à Gaza – des militants peut-être, mais sûrement pas une armée.

Donc c’est une armée, l’une des plus puissantes du monde, qui s’attaque à une population qui n’a vraiment pas de défense. Ca, c’est typiquement un crime de guerre.

A quoi peut aboutir cette offensive ?

C’est le plus grave. On a bien l’impression que une fois de plus des militaires essayent de mettre un terme à l’activité de guérilla. Nous avons vu que dans tous les cas de figure récents dans le monde, que ce soit le Vietnam, la Tchétchénie ou quoique ce soit d’autre, il n’y a pas de solution militaire. La solution c’est la négociation.

Ce qui se passe en ce moment au Caire est extrêmement important. Il faudrait que les dirigeants israéliens se rendent compte qu’à ne pas accepter une négociation et un cessez-le-feu, et une négociation pour la paix, ils font un tort immense à leur pays, et aussi à leur armée. Tsahal avait la réputation d’être une armée honorable. Elle ne l’est plus lorsqu’elle frappe sur des gens sans défense.

C’est également le spectre de l’échec en 2006 au Liban qui revient, et pourtant de nombreuses résolutions depuis de nombreuses années, ont été prises notamment au Conseil de Sécurité de l’ONU, mais jamais appliquées pour quelles raisons selon vous ?

Parce que l’Etat d’Israël, depuis des décennies, a réussi à berner sa population. A faire croire à sa population que l’Etat était en danger, que sa sécurité était à chaque instant menacée, et que pour cela il ne fallait ne tenir aucun compte de ce que pense la communauté mondiale, et s’assurer en tout cas de l’appui de l’Etat évidemment le plus puissant à l’heure actuelle, les Etats-Unis. Nous ne pouvons qu’avoir un espoir, c’est qu’avec l’arrivée au pouvoir de Barack Obama, les Etats-Unis cesseront d’apporter un soutien inconditionnel et dramatique à un Etat qui continue à violer les résolutions internationales.

Mais le choix de la violence, [provient du fait] que la blessure de la seconde guerre mondiale et de la Shoah n’est pas refermée…

Oui, c’est évidemment ce qui permet à un gouvernement qui lui n’a plus rien à voir avec cette Shoah, et qui n’est plus composé de victimes potentielles de cette Shoah… que ce gouvernement puisse s’appuyer sur ce souvenir dramatique, auquel nous sommes tous extraordinairement sensibles, moi tout le premier. C’est l’horreur, absolue commise par les nazis. Mas cela ne doit pas permettre à un Etat d’Israël, actuellement le plus puissant de la région, de violer impunément toutes les règles internationales.

Vous êtes très sévère avec l’Etat d’Israël, Stéphane Hessel… Jusqu’à maintenant le chemin vers la paix c’était deux Etats côte à côte, un Etat Palestinien et un Etat Israélien. Est-ce encore possible, ce partenariat avec les Palestiniens ?

C’est la seule solution. Elle est rendue de plus en plus difficile, au fur et à mesure que s’accumulent de part et d’autre, soit le mépris et l’humiliation, soit la haine. Il faut que cette accumulation cesse le plus vite possible, et alors, au nom de ce que l’histoire nous a appris sur la possibilité du pardon – nous l’avons éprouvé, nous européens, et dans d’autres pays, en Afrique du Sud aussi – il faut avoir hâte que cette possibilité de pardon et de solidarité dans un Proche-Orient pacifique puisse être rétablie.

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Un peu de science poétique, dans la catégorie dérive des continents, en hommage à Alfred Wegener…


650 Millions s’années en 80 secondes

Un peu d’histoire, dans notre grande série « Intégrisme et manipulation mentale », mention Généalogie de Ben Laden…

assassins La secte des Assassins et le Vieux de la MontagneLe Vieux de la Montagne (Chayr al-Jabal [peut se traduire « Vieux de la montagne » mais aussi le « Sage de la Montagne » ou encore le « Chef de la Montagne » selon le sens qu’on donne au mot « chayr »]) est l’appellation commune que les Templiers donnaient à leur ennemi juré, le grand-maître de la secte des Assassins, Hassan Sabbah (Sayyidna Hasan Bin Sabbah) (1034-1124). C’était un homme de grand savoir, grand savant, qui connaissait parfaitement les plantes et leurs vertus curatives, sédatives ou stimulantes. Il cultivait toutes sortes d’herbes et soignait ses fidèles quand ils étaient malades, sachant leur prescrire des potions pour leur rafraîchir le tempérament. Être sensé de raison et de savoir ou fou, aimable ou exécrable, préférant les mots vrais aux mots plaisants, aimant et méprisant les honneurs,  » le paradis et l’enfer sont en toi » ainsi dit le grand savant Omar Khayyam (1047-1122) à son propos.

Ses hommes étaient connus sous l’appellation péjorative de Haschischins ou Haschischioun, parce qu’ils auraient consommé beaucoup de haschisch avant de se lancer dans des commandos-suicide. Leur célébrité est telle qu’ils sont à l’origine du mot « assassins ». en réalité, aucune recherche sérieuse n’a permis d’attester le recours à des drogues afin de fanatiser les hommes. Selon les textes provenant d’Alamout, Hassan lui-même aimait appeler ses adeptes « Assassiyoun », ceux qui sont fidèles au Assas, au  » fondement » de la foi. Le terme pourrait aussi simplement provenir du nom d’Hassan, (Hassanjins, les djins de Hassan)

alamut La secte des Assassins et le Vieux de la MontagneLa secte est issue d’une branche de l’Islam chiite. Ses membres se déclarèrent partisans du neveu de Mahomet, lequel, étant descendant du Prophète par les femmes n’était pas reconnu par l’ensemble des musulmans. Selon les témoignages du voyageur vénitien Marco Polo (1323) et de nombreux historiens persans, les Haschischins vivaient dans la forteresse d’Alamut, à 1800 mètres d’altitude, dans le Mazenderan, au sud de la mer Caspienne, dans l’Iran actuel. Confinés dans leurs montagnes et ne disposant pas des moyens d’entreprendre des guerres conventionnelles, ils imaginèrent d’envoyer des commandos de six hommes (les fidawis) chargés de poignarder des chefs ennemis, le plus souvent tandis qu’ils se livraient à leurs dévotions dans des mosquées.

Ceux désignés pour commettre les meurtres étaient anesthésiés avec du haschisch, introduit dans leur nourriture sous forme de pâte mélée à de la confiture de rose. Le Vieux de la Montagne leur parlait longuement et les hommes s’endormaient car le haschisch est une drogue soporifique et non pas excitante. Assoupis, ils étaient transportés dans un jardin secret, au fond de la forteresse d’Alamut. A leur réveil, ils s’y retrouvaient environnés de jeunes esclaves, filles et garçons, empressés à réaliser tous leurs désirs sexuels. Ils étaient arrivés en guenilles. Ils se découvraient en robe de soie verte rehaussée de fils d’or et, tout autour, c’était le Paradis: vaisselle de vermeil, vins suaves à profusion, roses aux délicats parfums, haschisch à volonté. Drogue, sexe, alcool, luxe et volupté. Ils étaient convaincus d’être dans les jardins d’Allah, d’autant plus que ce lieu était une oasis particulièrement rare en une région aride et montagneuse.

alamut-luiditeIls étaient ensuite de nouveau anesthésiés à la pâte de haschisch, puis ramenés au point de départ dans leurs anciennes défroques. Le Vieux de la Montagne leur déclarait alors que, grâce à ses pouvoirs, ils avaient eu la chance de goûter furtivement au Paradis d’Allah. A eux d’y retourner définitivement en mourant en guerriers ! Le sourire aux lèvres, les fidawis partaient alors docilement assassiner vizirs et sultans. Arrêtés, ils marchaient au supplice, le visage extasié. II n’y avait que les prêtres haschischins de haut échelon (sixième degré) à connaître le secret des faux jardins d’Allah.

Aucune ville, aucune province, aucune route, ne sont épargnées. Devenu maître de la rue, Hassan impose sa loi, mais ayant une grande connaissance des inimitiés règnant dans les palais, les diwans et les cours, il devient aussi maître dans l’art d’amplifier les haines entre puissants, entre héritiers… Jouant leurs jeux pervers, il leur offre alors ses services selon ses propres desseins, pour faire exécuter, poignarder, assassiner dans l’ombre. Qu’il soit un brave homme croisé au coin d’une rue, un pauvre individu vêtu de guenilles, l’exécuteur va très vite, l’éclair d’une lame, en un seul mouvement, un poignard perce le corps. Puis il se laisse prendre, torturer, égorger ou jeter dans un feu… là est la grande puissance de l’Ordre. D’innombrables messagers de la mort, Assassins d’Alamout connaîtront un tel sort, ne cherchant jamais à fuir. Assassinats politiques de dirigeants chrétiens ou perses, musulmans shiites ou sunnites…

Prêt et formé à répondre à la torture, l’Assassin récitait alors une suite de noms appris par coeur, dénoncés comme faisant partie de la confrérie, mais ciblés en fait par Hassan parmi des ennemis de la Secte. Aussitôt on recherchait les soi-disant complices. De cette façon, les juges du pouvoir local exécutaient les volontés de Hassan sans même le savoir.

La secte s’occupa d’abord de ses propres intérêts en promouvant le message d’Hasan i-Sabbah. Puis les Vieux de la Montagne constatèrent que leurs sbires fanatisés pouvaient rapporter gros. Ils louèrent leurs services au plus offrant. Les assassins se précipitaient pour se porter volontaires quand leur chef demandait: « Lequel d’entre vous me débarrassera de tel ou tel ? » Ainsi périt, entre autres, la poêtesse Açma, fille de Marwan. qui avait osé médire de ses alliés médinois, lesquels firent aussitôt appel aux bras mercenaires des haschischins.

La forteresse d’Alamut fut conquise en 1253 par le grand khan mongol Hulagu, général du grand khan chinois Mongkha. Les assassins eurent beau réclamer l’appui des sultans qu’ils avaient aidés. ceux-ci se gardèrent bien d’intervenir, trop contents de se débarrasser de ces dangereux trublions. Les haschischins massacrés purent vérifier qu’ils n’avaient connu qu’un ersatz de Paradis. Un monde sacré artificiel, fabriqué par les hommes pour les illusionner.

Un témoignage… impressionné :

Quand Djélaleddin envoya un ambassadeur à Hassan pour qu’il eût à lui rendre hommage, celui-ci dit à un de ses fidèles : « Tue-toi » ; à un autre « Jette-toi par la fenêtre », et ils obéirent sans réplique. Ils sont soixante-dix mille, ajouta-t-il, également prêts à obéir à mon premier signe.

Henri de Champagne, passant sur le territoire des Ismaélites alla visiter leur souverain, qui l’accueillit avec honneur. Sur chacune des tours dont le château était couronné se tenaient deux blancs en sentinelle ; le Sire fit signe à deux d’entre eux, et ils tombèrent brisés au pied du comte épouvanté, à qui le Vieux de la Montagne disait froidement : « Pour peu que vous le désiriez, à un autre signe de moi vous allez les voir tous à terre ». Lorsque son hôte prit congé de lui, il lui entendit prononcer ces mots : « Si vous avez quelque ennemi, faites le moi savoir, et il ne vous tourmentera plus ».

Histoire universelle de Cesare Cantù

Finissons par les mots d’Hassan :

hassan La secte des Assassins et le Vieux de la MontagneIl ne suffit pas de tuer nos ennemis, nous ne sommes pas des meurtriers mais des exécuteurs, nous devons agir en public, pour l’exemple. Nous tuons un homme, nous en terrorisons cent mille. Cependant, il ne suffit pas d’exécuter et de terroriser, il faut aussi savoir mourir, car si en tuant nous décourageons nos ennemis d’entreprendre quoi que ce soit contre nous, en mourant de la façon la plus courageuse, nous forçons l’admiration de la foule. Et de cette foule, des hommes sortiront pour se joindre à nous. Mourir, est plus important que tuer. Nous tuons pour nous défendre, nous mourrons pour convertir ; pour conquérir. Conquérir est un but, se défendre n’est qu’un moyen. Vous n’êtes pas faits pour ce monde, mais pour l’autre.

Hassan Sabbah