Un excellent article de Courrier International, sur la campagne Israelienne. Je trouve frappante l’argumentation, qui fleure tellement bon le fascisme des années 30…

Aujourd’hui, le parti Israël Beiteinou réclame des preuves de loyauté aux Arabes. Et, demain,à tout Israélien en désaccord avec ses idées ?

Le slogan “Bli ne’emanout, ein ezrahout” [Sans loyauté, pas de citoyenneté] appartient aux régimes les plus sombres de l’Histoire, des régimes qui emprisonnent, torturent, envoient aux travaux forcés ou font “disparaître” les gens suspectés de déloyauté. Dans les pays soumis à ces régimes, les citoyens vivent dans la peur. Lorsqu’ils se racontent des blagues, c’est en cachette car, sous ces régimes, des programmes comme Aretz nehderet [“Un pays magnifique”, les Guignols de l’info israéliens] sont impensables. Et la peur de parler et d’être dénoncé par des amis ou par des voisins est totale.

“Sans loyauté, pas de citoyenneté”. A première vue, quoi de plus logique ? Pourquoi le pays devrait-il choyer ceux qui font preuve d’infidélité à son égard ou qui lui veulent du mal ? Pourtant, ce slogan est un piège qui ne nous promet qu’une vie de peur. Car, dans le fond, qui sera habilité à déterminer notre degré de loyauté ? Comment fera-t-on la distinction entre la déloyauté et le désaccord politique avec une position officielle ? Dès lors que cette déloyauté sera définie par les autorités, toute forme de critique sera interprétée comme de la déloyauté.

“Lieberman ne parle pas de nous [les Juifs]”, pensent la plupart des Israéliens. Et pourtant, si. Le programme d’Israël Beiteinou a le mérite de ne rien cacher. Dans le chapitre “Citoyenneté et égalité”, sous le titre “La fermeté contre la subversion”, il est écrit : “Nous ferons le nécessaire pour interdire les partis et les organisations dont les paroles ou les actes constituent une atteinte à l’Etat d’Israël en tant qu’Etat juif sioniste.” Quant aux spots menaçants d’Israël Beiteinou, quels exemples de déloyauté montrent-ils ? Une manifestation contre l’opération Plomb durci [la guerre à Gaza en janvier 2009] organisée devant l’Université hébraïque de Jérusalem ! C’est clair et net. Où se situe le seuil de loyauté ? Au Balad [parti autonomiste arabe] ? Au Hadash [ex-communiste judéo-arabe] ? Au Meretz [social-démocrate et pacifiste] ? Ou carrément à Kadima [le parti centriste de Tzipi Livni], qui a lancé des négociations sur la restitution du Golan ?

Avez-vous un jour donné de l’argent au mouvement La Paix maintenant ? Avez-vous déshonoré Israël en participant à la manifestation de masse contre les massacres de Sabra et Chatila [1982] ? Avez-vous soutenu les accords d’Oslo lors de la manifestation du 4 novembre 1995 [où fut assassiné Yitzhak Rabin] ? Avez-vous soutenu l’évacuation des colonies de Gaza [2005], c’est-à-dire fait l’apologie de la cession de territoires à l’ennemi et donné une prime au terrorisme ? Ce n’est pas le fruit de mon imagination. Le 2 octobre 2007, dans une interview accordée à [la radio militaire] Galei Tsahal [à l’occasion des 40 ans du Goush Etzion, un bloc de colonies à l’ouest de Bethléem], Lieberman, alors ministre des Questions stratégiques, s’en était pris vertement à ceux qui militaient pour le boycott des artistes soutenant la colonisation de peuplement. “Tous nos ennuis, tous nos problèmes, toutes nos victimes, c’est à cause de ces gens. Nos problèmes ne viennent ni du monde extérieur ni de la communauté internationale, mais de ces gens.”

Une fois que nous serons engagés sur ce terrain glissant, il sera difficile de remonter la pente. Au début, la loi ne s’en prendra qu’à la minorité arabe. Mais, très vite, ce sera chaque citoyen qui se demandera s’il met en danger son emploi ou sa famille. A partir de là, seuls des gens issus de l’élite israélienne seront encore capables de protester, avant d’être eux aussi réduits au silence. C’est ce qui s’est passé en Argentine, en Chine, en Iran, en URSS et, oui, en Allemagne.

Que le parti de Lieberman soit l’un des piliers de la future coalition ou qu’il dirige l’opposition, ses lois sur la loyauté finiront bien par être votées. Et si la Cour suprême s’avise de l’en empêcher, il tentera de restreindre ses compétences. Tout simplement parce qu’Israël Beiteinou prône la restriction des droits les plus élémentaires sur lesquels se fonde toute société démocratique, à commencer par la liberté d’opinion. Et, si l’on supprime ces droits, il n’y a plus de démocratie.

Léon Deouell – Professeur de psychologie à l’Université hébraïque de Jérusalem.
Yediot Aharonot

canard Laide au retour - façon Besson… Article dans l’excellent Canard enchaîné du mercredi 18 mars 2009.

 

Des sans-papiers qui osent rentrer tout seuls chez eux, sans laisser au ministère de l’Immigration le privilège de les expulser? Intolérable ! Heureusement, la police veille. Le 2 mars, sept Marocains qui voyageaient en car ont été arrêtés près de Perpignan, au moment où ils passaient la frontière espa­gnole pour rentrer en fourbes chez eux. Rebelote le 7 mars, avec dix autres travailleurs marocains chopés alors qu’ils filaient en douce … vers le Maroc.

Dans les Pyrénées-Orien­tales, c’est devenu un sport local : « La police attrape les sans papiers qui quittent le ter­ritoire pour gonfler le chiffre des expulsions », explique la Cimade, seule association pré­sente dans les centres de ré­tention.

Attrapés au vol, nos Marocains – qui ne faisaient que passer en France après être partis d’Italie! – ont eu droit à un traitement de choix.

Tirés hors du car manu mi­litari, la plupart n’ont pas pu prendre leurs valises. Et les bagages se sont volatilisés en chemin … « Le chauffeur a pro­posé de convoyer les bagages jusqu’au Maroc, explique sans rire le cabinet du ministre de l’Immigration Eric Besson. Les policiers n’auraient pas dû laisser faire. La règle est que les personnes gardent leurs af­faires avec elles.  »

Cerise sur la valise en carton, les dix Marocains interpellés le 7 mars ont eu droit à une « sale garde à vue », rapporte la Cimade : fouilles au corps et à nu, insultes, et des policiers qui, dans la soirée, ont mis un film porno à la télé, en poussant le son…

L’enquête ouverte après la plainte de la Cimade ne montre aucun mauvais traitement, affirme le cabinet Besson.

« D’ailleurs, on voit mal des fonctionnaires mettre un film porno avec tous les gens qui passent dans un commissariat. » Puisque c’est impensable, on n’ose y penser.

Depuis, nos Marocains ont rejoint le centre de rétention de Perpignan pour être ex­pulsés… en avion, via Paris. On touche au génie: à vouloir expulser tout ce qui passe, l’Etat se retrouve donc à payer les billets d’avion de sans-pa­piers qui, de leur plein gré, rentraient chez eux en car­ferry ! « Ces Marocains au­raient très bien pu s’arrêter en Espagne », rétorque le minis­tère de l’Immigration. Heu­reusement pour l’Espagne, la France expulse aussi les sans­-papiers des autres…

canard Bienvenue en Union soviétique ! Billet d’humeur de grand intérêt de Jean-Luc Porquet dans l’excellent Canard enchaîné du mercredi 18 février 2009.

Alors que la loi Bachelot s’apprête à transformer les hôpitaux en entreprises, voilà que Jean-Vital de Monléon, pédiatre au CHU de Dijon, rappelle qu’y règne déjà un nouveau système de comptabilité, connu sous le nom de T2A, tarification à l’activité. Lorsqu’un patient quitte le service, l’hôpital doit lui attribuer un code international qui correspond à un diagnostic. « C’est grâce à ce sacro-saint codage que nous obtenons un financement, officiellement en rapport avec notre activité. » ( » Libé », 12/2).

Il y a des pratiques qui rapportent à l’hôpital beaucoup de points et de subsides, IRM, échographie cardiaque, chirurgie, par exemple. Et d’autres, comme la prévention, pas grand chose. Le même pédiatre raconte qu’en Russie ses confrères, victimes du même système, en viennent à falsifier les dossier médicaux des enfants, et à leur attribuer des maladies graves, afin de bénéficier des bons codages et du pognon afférent. « Les régimes changent, mais les habitudes restent. » Les hôpitaux français, à qui on va désormais demander d’être rentables, vont-ils s’y mettre à leur tour ?

bienvenue-en-us Bienvenue en Union soviétique !Depuis quelque temps déjà, les indices de ce genre s’accumulent, qui mènent à s’interroger : et si la France était en train de devenir un pays soviétique ? Sans les soviets, bien sûr. Mais avec tout le reste…

Trois types d’indices, au moins.

Un, les petits riens quotidiens. Ces réservations de train de plus en plus difficiles à se procurer, ces queues interminables aux guichets. Ces démarches de plus en plus hasardeuses, que ce soit pour un renseignement ou une réparation, avec barrages à franchir avant de débusquer un interlocuteur caché derrière sa « boîte vocale ». Cette absence de responsables, c’est toujours la faute à l’autre ou à l’informatique. Ces salariés tellement mal traités et déconsidérés qu’ils s’en foutent, j’ai un sale boulot je le fais salement. La démobilisation générale.

Deux, le décalage grandissant entre les mots et la réalité. Entre le bla-bla déversé dans les grands médias par les nouveaux apparatchiks et nos vies. La langue de bois soviétique avait la même fonction, enfumer le réel, faire croire à une irrésistible marche en avant vers l’avenir radieux, avec poignée de formules répétées jusqu’à l’hypnose. Hier, n’est-ce pas,  » l’action commune des masses laborieuses permettra de faire du passé table rase « . Aujourd’hui, « Il ne faut pas faire de pause dans les réformes », Et d’ailleurs : « Halte à l’immobilisme ! » Enfumage : Sarkozy vantant son « Etat irréprochable, et se proclamant « Président du pouvoir d’achat ». Enfumage : le plan de relance aux mille chantiers : on pense au Gosplan sur la comète, qui fixait des objectifs dont chacun savait qu’ils étaient bidons.

Trois, ce qui se passe au sommet de l’Etat. Cet atterrant culte de la personnalité. Ce numéro 1 qui s’auto-glorifie sur tous les écrans et en toute occasion. Sa cour de lèche-bottes qui en rajoutent. Et aussi cette parano qui gagne : l’appareil policier dont il s’entoure, les armées de flics mobilisés pour ses moindres déplacements. Cette volonté affichée de généraliser le flicage, fichiers, vidéosurveillance, etc. Cet ennemi intérieur chaque jour montré du doigt, grévistes, juges, enseignants-chercheurs, chômeurs, cheminots, fonctionnaires, etc.

Bref, un système d’une incroyable morgue, inefficace, autoritaire, qui s’imagine indéboulonnable.

Jean-Luc Porquet

D’excellentes analyses sur ContreInfo…

A la dérive, par Paul Krugman

Dans les premières mois de cette crise nous écrivions que la culture économique des responsables politiques américains, leur foi inébranlable dans les dogmes de l’école de Chicago, les rendaient peu aptes à comprendre la situation et donc à agir efficacement. L’équipe constituée par Obama semble atteinte du même mal. Nationalisation reste un mot tabou, honteux, que la nouvelle administration se refuse à évoquer, alors même que le cours de l’action de la banque Citigroup flirte avec le dollar – c’est à dire l ’éviction de la cote new yorkaise – et que de tous côtés les appels se font de plus en plus pressants pour une prise de contrôle publique. Ce blocage psychologique, ce vertige devant la transgression, se traduisent en acte par un aveuglement qui confine à l’absurde. On ne peut entendre la récente déclaration d’Obama affirmant que le privé est « plus efficace » pour gérer le système bancaire sans ressentir un malaise devant cette forme d’humour involontaire. Au nom de quoi faudrait-il donc continuer à révérer des idoles qui pourtant s’effondrent avec fracas sous nos yeux, entraînant dans leur chute de trop nombreuses victimes ? Car il y a urgence à agir. Les politiques menées sur les deux rivages de l’Atlantique ne sont pas à la hauteur des périls, avertit Krugman, qui déplore également la courte vue dont font preuve les dirigeants européens devant le risque systémique posé par l’Europe de l’Est et se demande dans quel monde vit Jean Claude Trichet lorsqu’il estime que le risque déflationniste n’est pas à l’ordre du jour. Dans une séquence de déflation de la dette, tout délai, tout retard à agir, se traduit par une contagion d’un processus de liquidation généralisé qui gagne peu à peu en force et en élan et rend plus difficile le retournement de cycle. Il faut donc trancher dans le vif au plus tôt, trier les banques, constater les faillites, et le cas échéant nationaliser. Roubini estime qu’il faudra sans doute six mois pour que l’inévitable soit enfin accepté. Si c’est le cas, ce sont six mois de perdus alors que gagne l’incendie.

Par Paul Krugman, New York Times, 2 mars 2009
A lire en intégralité ici sur ContreInfo

Les raisons du déclin de l’économie US, par Paul Craig Roberts

Paul Craig Roberts, qui fut sous secrétaire au Trésor de Reagan, est un homme de droite, partisan convaincu des politiques de l’offre. Pourtant, rien ne justifie pour lui les politiques du laisser faire débridé qui ont conduit à la perte de substance de l’économie américaine, si ce n’est une certaine illusion de toute puissance allant de pair avec la situation prééminente dont jouissaient les USA. Les promesses des tenants de la mondialisation n’ont pas été tenues, dit-il, au contraire. Les délocalisations, présentées comme un processus naturel de substitution entre la « vieille économie » et celle de l’innovation et du savoir, ont eu pour résultat la stagnation des revenus – donc l’endettement excessif – de la plus grande partie de la population à l’exception des « super-riches », et le creusement de déficits abyssaux, qui sont tous deux à l’origine de cette crise. Au delà du constat, Roberts propose quelques mesures radicales – voire aussi définitives qu’un verdict de Fouquier Tinville – pour tenter de juguler la crise : l’annulation des CDS, la suspension de la règle de comptabilisation des actifs au prix du marché, l’interdiction de la vente à découvert sur les marchés baissiers et sur les devises. Un dernier point. Le protectionnisme dont il se réclame a mauvaise presse. Et lorsqu’il désigne ensemble la mondialisation et les visas de travail accordés aux étrangers comme responsables de la pression à la baisse sur les salaires, il prête le flanc à l’accusation de xénophobie, si souvent présente dans ce débat. On ne peut pourtant se contenter d’une vision uniquement morale sur cette question. Ce serait méconnaître le fait que les niveaux de prix – i.e. des salaires – ne reflètent pas seulement la concurrence libre et non faussée, comme le dit la vulgate, mais aussi l’état de rapports de force sociaux, dont la préservation de l’équilibre est éminemment nécessaire au développement harmonieux des sociétés. En s’effarouchant devant la perspective d’une limitation de la concurrence internationale à laquelle sont soumis les salariés, en condamnant par avance comme délétère toute référence à l’idée de nation on ignore – ou feint d’ignorer – un déterminant fondamental. Le socle de la démocratie, du vivre ensemble, c’est ce territoire où se définit la citoyenneté concrète, régi par une loi et une constitution commune, par des droits et des devoirs partagés, et protégé par les institutions. La position consistant à abstraire de cette définition l’activité humaine fondatrice qu’est le travail n’est à notre sens tout simplement pas tenable.

Par Paul Craig Roberts, Vdare, 23 février 2009
A lire en intégralité ici sur ContreInfo

L’éclatement d’une bulle de crédit de dimension historique, par Doug Noland

Alain Minc a affirmé cette semaine que cette crise n’était pas si considérable, que somme toute une baisse de 2% du PIB équivalait à un retour à l’année 2007, et que l’action résolue des gouvernements et des banquiers centraux avait évité le pire. Si le rebond avait lieu immédiatement, sans doute pourrait-on lui donner raison. Mais les annonces de pertes énormes continuent de se succéder à un rythme soutenu et la dégradation massive du niveau d’activité dans de nombreux pays et secteurs économiques n’augure pas d’un retournement de cycle rapide. Non, il ne s’agit pas d’une récession « standard. » Ce qui se déroule sous nos yeux, c’est un processus de liquidation d’une gigantesque bulle de crédit, qui concerne bien plus que l’immobilier américain. Durant la dernière décennie, ce sont non seulement les ménages finançant leur logement, mais aussi l’économie américaine dans son ensemble qui a eu recours massivement à la dette. Dans son bulletin de veille hebdomadaire, Doug Noland se penche sur les chiffres de la Fed qui donnent le détail de ces bulles de dettes qui sont en train de crever aujourd’hui. Globalement, l’en cours du crédit aux USA est passé de 18 000 à 45 000 milliards entre 1995 et 2007, soit une croissance de 170% alors que dans le même temps le PIB n’augmentait que de 87%. De tels chiffres peuvent sembler dépasser l’entendement. Pour mémoire, rappelons que le PIB US est de 14 500 milliards et de 50 000 milliards pour le monde entier. De toute évidence, l’apparente bonne santé de l’économie américaine dissimulait un recours intensif au crédit. L’économiste Hans Magnus a calculé que chaque dollar de PIB US supplémentaire se traduisait par 4,5 dollars de crédit en 2007, contre 1,5 entre 1950 et 1980.

Par Doug Noland, Prudent Bear, 26 février 2009
A lire en intégralité ici sur ContreInfo

Récession en L et dé-mondialisation, par Wolfgang Münchau

Münchau estime que « nous sommes à l’heure actuelle quelque part au milieu de la barre verticale du L. » Mais, avertit-il, « c’est l’horizontale qui est la plus effrayante. » La liquidation de la dette américaine va se traduire par une phase d’atonie prolongée de plusieurs années, le temps d’apurer les bilans, nous dit-il. Dans le grand livre de comptes de l’économie mondiale, les déficits des uns sont les excédents des autres. Le désendettement des ménages et la réduction des déficits US se traduiront donc par une baisse symétrique de l’activité des pays exportateurs, au premier rang desquels la Chine, l’Allemagne et le Japon. Faute de pouvoir tabler sur un redémarrage proche, ceux-ci n’auront d’autre choix que de réorienter leur économie vers la demande intérieure, juge Münchau.

Par Wolfgang Münchau, Financial Times, 9 mars 2009
A lire en intégralité ici sur ContreInfo

Le système bancaire US est insolvable, par Nouriel Roubini

Roubini met une nouvelle fois en garde contre le risque de récession – voire de dépression – en L, qui semble se confirmer avec une contraction au quatrième trimestre 2008 de 6% du PIB aux USA et en Europe, de 12% au Japon, et de 20% en Corée. Comme la plupart des économistes, il estime que les autorités européennes n’ont pas pris conscience de la gravité des enjeux et font preuve d’une dangereuse frilosité en se refusant à agir résolument et rapidement. La situation américaine n’est pourtant guère meilleure. Sur les 800 milliards du plan de relance d’Obama, 200 seulement seront alloués cette année, sur lesquels une centaine devraient disparaître en épargne des ménages. Au total, l’effet de la relance serait donc inférieur à 1% du PIB en 2009. Mais il y a plus encore, l’économie mondiale ne repartira pas tant que de profondes reconversions n’auront eu lieu tant chez les exportateurs qu’aux USA. La système bâti sur la surconsommation et le déficit américain d’une part, et les économies exportatrices d’autres part, ne repartira pas en l’état, car le désendettement des ménages américains sera un processus long et douloureux. Dans l’immédiat, la restructuration du système financier aux Etats-Unis est plus que jamais nécessaire. Avec le ralentissement économique, les pertes pourraient atteindre 3600 milliards de dollars, estime-t-il. Conclusion : le secteur est en état de faillite, et la nationalisation s’impose, sans quoi les sommes gigantesques apportées par l’Etat ne servent qu’à tenter de protéger les actionnaires et les créanciers, pour le moment en pure perte.

par Nouriel Roubini, Forbes, 5 mars 2009
A lire en intégralité ici sur ContreInfo

Fin de partie pour les déficits par Kenneth Rogoff

Pour l’heure, personne n’a encore d’idée précise du moment où finira la crise financière mondiale. Mais une chose est sûre : les déficits budgétaires atteignent des sommets. Et il faudra convaincre les investisseurs d’accumuler des montagnes de nouveaux bons du Trésor.

Même si les gouvernements essaient de faire avaler leur dette aux épargnants nationaux, en utilisant, par exemple, leur influence grandissante sur les banques pour les forcer à avoir une quantité disproportionnée de papiers d’Etat, ils finiront eux aussi par payer des taux d’intérêt de plus en plus élevés. Dans deux ans, les taux sur les bons du Trésor américains à long terme pourraient facilement augmenter de 3 % à 4 %.

Ce renchérissement doit permettre de compenser des investisseurs qui auront à la fois à prendre de plus en plus de bons d’Etat et, donc, à prendre de plus en plus de risques face aux menaces d’inflation ou de défaut de paiement des gouvernements.

Historiquement, le montant de la dette publique double, même après correction pour inflation, les trois années qui suivent une crise. Nombre de nations, grandes et petites, sont aujourd’hui bien parties pour confirmer cette donnée historique.

Le gouvernement chinois a clairement indiqué qu’il utiliserait tous les moyens nécessaires pour soutenir la croissance en cas d’effondrement des exportations. Les Chinois disposent d’une réserve de 2.000 milliards de dollars en devise forte pour tenir leur promesse.

Le nouveau budget du président Barack Obama prévoit un déficit astronomique de 1.750 milliards de dollars. Même les pays qui ne se sont pas lancés dans la course effrénée aux dépenses voient leurs excédents chuter et leurs déficits monter en flèche, principalement en raison de la diminution des recettes fiscales.

En fait, peu de gouvernements ont présenté des prévisions budgétaires réalistes car ils s’appuient en général sur des scénarios trop optimistes. Malheureusement, en 2009, la situation économique mondiale ne sera pas rose. La production américaine des Etats-Unis et de la zone euro a décliné, apparemment, d’un taux annualisé d’environ 6 % au quatrième trimestre 2008 ; le PIB du Japon a peut-être baissé de deux fois ce taux.

La Chine a affirmé que son PIB a augmenté de 6 % à la fin de l’année dernière. On peut en douter car les exportations se sont effondrées dans toute l’Asie, y compris en Corée, au Japon et à Singapour. Il est probable que l’Inde et, dans une moindre mesure, le Brésil s’en sortent un peu mieux. Cependant, peu de marchés émergents ont atteint un stade auquel ils peuvent résister à un effondrement soutenu des économies développées et encore moins jouer les moteurs d’une reprise économique mondiale.

La production mondiale est au bord du précipice en 2009. Avec l’assèchement du crédit, beaucoup de petites et moyennes entreprises éprouvent des difficultés pour obtenir les financements minimaux pour simplement maintenir des stocks et vendre.

En toute probabilité, nombre de pays verront leur production baisser de 4 % à 5 % en 2009. Pour certains, la chute sera voisine d’une dépression, c’est-à-dire de plus de 10 %. Pis encore, à moins que les systèmes financiers ne rebondissent, la croissance pourrait être décevante pendant des années, en particulier dans les pays les plus touchés, comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, l’Irlande et l’Espagne.

Les pays qui ont des taux de croissance à l’européenne pouvaient supporter une dette publique égale à 60 % du PIB lorsque les taux d’intérêt étaient faibles. Or, avec un endettement de 80 % à 90 % du PIB dans une multitude de pays et la hausse prévisible des taux d’intérêt, on peut s’attendre au pire. La plupart de ceux qui amassent d’énormes dettes pour sauver leurs banques n’ont que de faibles perspectives de croissance à moyen terme, ce qui soulève de réelles questions d’insolvabilité et de durabilité.

Par exemple, l’Italie a pu longtemps faire face à une dette publique supérieure à 100 % tant que les taux d’intérêt étaient faibles. D’autres pays, tels l’Irlande, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, qui ont commencé avec une position budgétaire bien plus solide, ne seront pas mieux lotis quand la crise se dissipera.

Les taux de change sont une autre inconnue. Les banques centrales asiatiques se cramponnent toujours nerveusement au dollar. Pourtant, puisque les Etats-Unis empruntent et font tourner à plein régime la planche à billets, l’euro pourrait s’apprécier vis-à-vis du dollar dans deux ou trois ans… à condition qu’il existe toujours.

A mesure qu’augmenteront leurs dettes et que s’éternisera la récession, nombre de gouvernements s’efforceront sûrement d’alléger leur fardeau par le biais de la répression financière, d’une inflation plus élevée, de défauts de paiement ou d’une combinaison des trois. Malheureusement, l’issue de la grande récession des années 2000 ne sera pas belle à voir.

Kenneth Rogoff, ancien économiste en chef du FMI, est professeur d’économie et de politiques publiques à l’université d’Harvard.

A lire en intégralité sur le site LesEchos.fr

Issues du site ContreInfo, Radar du 24/2/09

Le Dow Jones à son niveau de 1997

Taggé par les garnements du FT Alphaville, voici l’évolution du Dow Jones depuis 1956 Zoom (en rouge, les volumes échangés). Bulles, vous avez dit bulles ? Les chartistes optimistes espèreront sans doute trouver un support en prolongeant la tendance 1986-1995 (nous n’en sommes pas loin). Reste que si on prend en compte la longue durée, le paysage est sensiblement différent…

dow_jones_1997_fta1 Quelques données sur la crise...

Comparaison de la séquence actuelle (en bleu) avec les marchés baissiers de 1930 (gris clair), 1973 (rouge), et l’éclatement de la bulle internet (vert).

4bears-11 Quelques données sur la crise...

La perspective du Price/Earning Ratio

sp_500_pe Quelques données sur la crise...

Calculé selon la méthode de Graham et Dodd, c’est à dire en rapportant le prix de l’action à la moyenne mobile sur 10 ans des bénéfices, le PE est aujourd’hui à 13,6, contre une valeur moyenne de 18 depuis 1871. Mais durant la dépression des années 1930 il était descendu à 5.

Si vous avez le courage, je vous suggère la lecture du Radar du 8 mars 2009

Un excellent article d’Alternatives Économiques

Un salaire maximum pour les dirigeants des entreprises recevant une aide de l’Etat : cette mesure, annoncée par Barack Obama mercredi 4 février dans le cadre du plan de relance américain, a le mérite de relancer le débat sur les rémunérations des grands patrons. Car les trente dernières années ont été marquées par une fantastique explosion des rémunérations des PDG et des acteurs de la finance. Cette évolution, injustifiable économiquement et inacceptable moralement, a joué un rôle majeur dans la crise que nous traversons actuellement.

La grande divergence », c’est le titre du chapitre que Paul Krugman, le prix « Nobel » d’économie 2008, consacre dans son dernier ouvrage (1) au formidable creusement des inégalités intervenu outre-Atlantique depuis les années 70. Il caractérise ainsi la période actuelle par rapport aux périodes antérieures de fortes inégalités: « Si l’Américain à haut revenu vers 1905 était par essence un baron de l’industrie qui possédait des usines, son homologue cent ans plus tard est un cadre supérieur immensément récompensé de ses efforts par des primes et des stock-options. »

Le jackpot des stock-options

Les Etats-Unis ont beaucoup de défauts, mais ils présentent au moins un avantage: ils ont une tradition ancienne d’information statistique de qualité. Notamment en matière de revenus et donc de mesure des inégalités. C’est ce qui a permis à Carola Frydman, d’Harvard, et à Raven E. Saks, de la Réserve fédérale, de reconstituer l’évolution des rémunérations des dirigeants des plus grandes entreprises du pays depuis 1936 (2). Les résultats sont spectaculaires. Entre 1936 et 1939, la rémunération moyenne des 150 dirigeants les mieux payés des 50 plus grandes entreprises américaines représentait 82 fois le salaire moyen. Entre 1960 et 1969, ce ratio était tombé à 39, après ce que Paul Krugman appelle la « grande compression », intervenue à la suite notamment de la mise en place par le président Franklin D. Roosevelt, après la crise de 1929, de taux d’imposition très élevés sur les plus hauts revenus.

Mais, après l’élection de Ronald Reagan en 1980, ce ratio est remonté en flèche pour atteindre 187 durant la décennie 90 et culminer à 367 au début des années 2000! Cette envolée est liée en particulier au développement d’un mécanisme de rémunération qui n’existait quasiment pas avant les années 50, mais concerne aujourd’hui 90% des patrons américains: les stock-options. Celles-ci, qui ne représentaient encore que 11% des rémunérations des 150 plus gros patrons américains dans les années 60, en pesaient 48% au début des années 2000. Du coup, alors que la rémunération directe des patrons américains n’a été, en moyenne, multipliée « que » par 3,1 en dollars constants entre les années 60 et le début des années 2000, leur rémunération totale est, elle, devenue 8,5 fois plus élevée…

Les données historiques rassemblées par Carola Frydman et Raven E. Saks s’arrêtent en 2003, mais l’histoire a continué. Après un passage à vide consécutif aux affaires Worldcom, Enron, etc., la rémunération des managers américains était repartie vers les sommets jusqu’à ces derniers mois. En 2007, selon une analyse de l’Associated Press sur les 500 sociétés du S&P 500, le PDG américain moyen avait touché 10,5 millions de dollars (7,7 millions d’euros), soit 2,6% de plus qu’en 2006. L’équivalent de 344 années de salaire moyen américain et 866 années de Smic états-unien…

Ironie de l’histoire: le PDG américain le mieux payé en 2007 était John Tain, PDG de la banque d’investissement Merril Lynch, avec un revenu annuel de 83 millions de dollars, soit 61 millions d’euros, 3 970 années de Smic français… Cela, juste avant que sa banque, emportée par la faillite de Lehman Brothers, ne soit rachetée en septembre dernier par Bank of America. Preuve, s’il en est besoin, de la faible corrélation entre le niveau de la rémunération des PDG et la qualité de leur gestion…

Article à lire sur le site d’Alternatives Économiques dans son intégralité

Rémunération annuelle moyenne des 150 personnes les mieux payées des 50 plus importantes entreprises des Etats-Unis, en millions de dollars constants de 2000 et rapportée au salaire moyen

remuneration-150 Revenus des dirigeants : la grande divergence

Rémunération moyenne des membres des équipes dirigeantes du CAC 40, en euros

remuneration-cac Revenus des dirigeants : la grande divergence

Le grand écart

salaires Revenus des dirigeants : la grande divergence

Force est de reconnaitre que nous avons une majorité qui fait vraiment de la défense de l’intérêt général contre les intérêts particuliers sa ligne d’action…

L’Assemblée a autorisé, lundi 9 mars, pour la première fois officiellement en France la publicité en faveur de l’alcool sur internet, avec des restrictions.
La loi Evin de 1991, adoptée avant l’apparition de l’internet, était muette sur ce sujet.
La ministre de la Santé Roselyne Bachelot a évoqué une « ouverture contrôlée et encadrée ».
Elle a ainsi donné son feu vert à un amendement UMP qui autorise la publicité pour l’alcool sur internet, avec des restrictions concernant notamment les sites « principalement destinés à la jeunesse ».
La restriction vise aussi des services en ligne « édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles ».
Cet amendement précise aussi que la publicité pour l’alcool ne doit pas être « intrusive » (par des spams ou des pop-ups).
La ministre a préféré cet amendement à un autre qui autorisait la publicité pour l’alcool sur intenet, mais en établissant une liste des sites où elle était permise (sites des producteurs, fabricants, importateurs, distributeurs, détaillants…), plutôt qu’en posant des restrictions.
Cet amendement retoqué, approuvé en commission par des députés de tous bords, avait les faveur du groupe PS.
Source Nouvelobs.com