La crise globale des années 2010
Économie février 9th, 2009Jean Claude Werrebrouck est professeur d’économie à l’université de Lille 2. Il livre ses reflexions sur la crise globale sur Contreinfo puis sur son nouveau blog
La crise globale des années 2010
Jean Claude Werrebrouck reprend ici de façon accessible à un public non initié les thèmes qu’il a développés lors d’un récent séminaire. Dans cette première livraison, après avoir rappelé le caractère fort singulier d’un secteur d’activité où, contrairement à tous les autres, la hausse des prix déclenche la ruée des acheteurs et non une réduction de la demande, il insiste sur le potentiel intrinsèquement déstabilisateur de ces mécanismes de la finance qui justifieraient amplement qu’elle soit domestiquée, « mise en boîte, » pour l’empêcher de nuire. Pourtant, l’histoire récente a vu se développer le processus inverse. La boite a été largement ouverte, et le secteur financier, de dérégulation en déréglementation, a pu acquérir, relativement à l’économie réelle, une prépondérance inconnue jusqu’à présent. Alors que les profits de la finance ne représentaient que 14% du total réalisé par les entreprises américaines en 1960, ce chiffre atteignait 37% en 2007.
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Dans cette deuxième partie de son étude, l’économiste Jean Claude Werrebrouck analyse le deleveraging – ce cycle destructeur de désendettement et de liquidation qui entraîne les actifs dans une spirale déflationniste – puis il évalue les contre mesures qu’ont mises en place les autorités pour combattre et tenter de maîtriser ce processus, et s’interroge sur leurs chances de succès. La réussite ne peut être garantie, avertit-il, car les Etats sont « beaucoup plus faibles qu’en 1929, » comparativement au poids du secteur financier. Mais le problème n’est pas uniquement celui de la finance et de sa réglementation. Le couple étrange que forment la Chine et les USA, dont le déficit structurel est financé en partie par l’épargne chinoise, porte également une responsabilité dans l’ampleur exceptionnelle de cette crise. Jean Claude Werrebrouck estime qu’il faudra « revenir sur l’actuelle division internationale du travail, donc la tacite mondialisation sous sa présente forme. »
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Dans ce dernier volet, Jean Claude Werrebrouck analyse les scénarios possibles de sortie de crise, et le rôle qu’y tiendront banques centrales et Etats, qui doivent désormais poursuivre l’accompagnement du processus de deleveraging, assister l’apurement du secteur financier, tout en relançant des économies atones. Les « hélicoptères » des banques centrales vont donc continuer de tourner à plein régime, estime-t-il, permettant ainsi de consolider la finance et de prévenir le risque systémique. Les Etats devront quant à eux s’endetter lourdement pour financer les relances économiques – et éventuellement assumer les garanties qu’ils ont accordées au secteur bancaire. Mais les difficultés croissantes qu’ils ne vont pas manquer de rencontrer dans leurs tentatives d’émettre de la dette pourraient bientôt contraindre à la généralisation du financement par émission monétaire, les banques centrales jouant alors le rôle d’acheteurs de dernier ressort des bons du trésor grâce à de l’argent créé pour l’occasion, en une remise en cause totale des dogmes du monétarisme, A terme ce processus est bien sûr potentiellement hautement inflationniste. Faut-il pour autant s’en inquiéter ? Pas forcément estime M. Werrebrouck, qui considère que l’inflation représente une partie de la solution requise pour la sortie de crise. Elle permettrait en effet de limiter les tensions spéculatives, de diminuer l’endettement des Etats, et du même coup l’ardoise intergénérationnelle accumulée depuis trente ans, sans oublier une remise en cause du statut du dollar, la devise de la mondialisation. Restent évidemment de nombreuses inconnues, au premier rang desquelles le comportement de la zone euro. Les tensions actuelles et futures risquent en effet d’aggraver le processus d’eurodivergence. « Les différentiels de compétitivité et d’inflation entre les pays de la zone se sont accumulés déjà depuis de longues années et la crise va jeter de l’huile sur un feu qui risque de ne plus être maîtrisable, » s’inquiète-t-il.
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Crise des années 2010 : L’inflation, prémice d’une restructuration mondiale
L’issue inflationniste ne fait aucun doute pour l’économiste Jean Claude Werrebrouck, qui propose ici son analyse des lignes de forces à l’oeuvre dans le déploiement de cette crise. Le recours massif aux politiques monétaires non conventionnelles pour contrecarrer la déflation des actifs, rendu inévitable faute d’autre solution, porte en lui « l’inéluctabilité de l’inflation », juge-t-il. Cette poussée inflationniste à venir aura pour conséquence de profonds bouleversements, tant au plan interne qu’international. Elle provoquera d’une part une salutaire redistribution de richesse entre créanciers et débiteurs, remettra en cause l’impératif de déflation salariale pour cause de concurrence internationale. Mais elle déclenchera également une « tempête sur les monnaies » remettant à l’ordre du jour les dévaluations compétitives. Dans ce contexte, le manque de bases solides dont souffre la monnaie européenne, en l’absence d’une politique de convergence et de transferts entre Etats, va provoquer des tensions qui seront sans doute insupportables pour certains membres de la zone euro, n’ayant d’autre alternative que de pratiquer une désastreuse politique de déflation salariale ou de reprendre leur autonomie. Ces turbulences monétaires auront également pour conséquence un processus de « dé mondialisation », avec « l’avènement d’économies beaucoup plus auto-centrées que par le passé », et une diminution du rôle joué par le dollar. Mais cette restructuration mondiale au forceps ne signe pas pour autant un retour du politique sur le devant de la scène, avertit-il. Les dirigeants en sont pour le moment réduits à accompagner des forces qui les dépassent, et ce n’est qu’après « l’incendie inflationniste que les hommes pourront envisager de nouvelles solutions à la question du vivre ensemble. »
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