La crise, suite…
Économie juin 1st, 2009Lu sur Contre info
Déficits publics : d’où viendra le financement ? par John Mauldin
26 mai 2009 – A l’image du célèbre paradoxe de l’épargne, John Mauldin pointe le paradoxe du déficit. Si un Etat peut mobiliser l’épargne mondiale pour financer une relance, qu’advient-il lorsque tous les gouvernements doivent s’endetter massivement au même moment ? Les énormes déficits publics prévus, pouvant encore s’aggraver avec la récession et si les pertes du secteur financier s’amplifient – tout particulièrement en Europe – ne trouveront pas les financements nécessaires, estime Mauldin. Et les premiers signes de faiblesse des bons du Trésor US apparus ces derniers jours indiquent que l’heure de vérité pourrait sonner bien plus tôt que prévu. Une remarque. Si le diagnostic porté sur l’Europe peut sembler forcer le trait, la réalité des risques soulignés face à l’exposition à l’est n’en est pas moins incontestable, et la situation de l’Espagne reste singulèrement préoccupante.
Les banquiers ont pillé les coffres publics, par David Leonhardt
5 mai 2009 – Dans nos sociétés, la fonction monétaire est en grande partie déléguée aux banques privées. Deux monnaies circulent côte à côte, l’une privée, l’autre publique, sans que nous en ayons en général nettement conscience, tant le passage de l’une à l’autre se fait « naturellement », en temps normal. La monnaie publique, les pièces et billets, ne représente qu’environ un dixième de l’argent en circulation. C’est en raison de son poids si considérable que le secteur bancaire, qui jouit de cette délégation et du même coup du privilège incomparable de se rémunérer sur la création monétaire, a fait l’objet de prudentes réglementations après la crise des années trente. Depuis cette époque, le crédit était encadré, et les banques devaient respecter sous le contrôle des autorités publiques des ratios dits « prudentiels » leur imposant de détenir d’une part des fonds propres en quantité jugée suffisante et d’autre part une réserve sous forme de monnaie d’Etat. Enfin, pour éviter un dangereux mélange des genres, l’activité de banque commerciale (soucieuse de la sécurité de ses clients) et de banque d’affaire (tentant de convaincre des investisseurs d’acquérir son papier) étaient distinctement séparées. Seules les premières, en raison de la délégation monétaire qui leur est accordée et de leur importance systémique, jouissaient de la garantie apportée par l’Etat et la banque centrale. Le big bang de la déréglementation impulsé par les USA dans les années 1990 a bouleversé ce paysage et fait sauter l’un après l’autre les garde-fous prudemment installés par la génération précédente, qui était elle bien décidée à ne jamais plus s’exposer aux désastres entraînés par l’effondrement de l’avant guerre. L’aveuglement idéologique des uns, l’intérêt bien compris des autres – les mêmes, parfois – a permis de rouvrir cette dangereuse boite de pandore dont nous savions pourtant combien morbides étaient les forces qui y étaient emprisonnées. Une fois détruite la muraille de la loi Glass-Steagall qui séparait l’activité de dépôt de celle d’investissement, les banques ont pu se lancer dans des montages financiers irresponsables, abritées qu’elles étaient derrière la certitude que l’Etat leur apporterait sa protection le jour – inévitable – où l’on feindrait de redécouvrir que, décidément non, les arbres n’atteignent jamais le ciel. Comment qualifier un tel comportement ? De pillage, tout simplement, avaient écrit dans les années 1990 deux économistes dont un futur prix Nobel, après avoir analysé la faillite des caisses d’épargne américaines qui venait d’avoir lieu. Un dernier point. Les Etats se sont dessaisis de la fonction régalienne de l’émission monétaire pour s’éviter d’y recourir trop facilement, tant est grande, dit-on, la tentation de se servir dans le pot de confiture lorsqu’il est ouvert. Ce qui n’a pas empêché, depuis 20 ans, de ne jurer que par les mérites de l’auto-régulation du privé et en l’occurrence du secteur bancaire. Ainsi, les parlements, élus par les peuples pour le service du bien public, seraient donc moins responsables que les dirigeants mus par l’appât du gain facile et immédiat ? Voilà à n’en pas douter une jolie fable moderne, dont la morale n’est pas encore entièrement écrite, mais qui s’annonce déjà ruineuse aux dépens de ceux qui l’ont écoutée.