Lu dans Courrier International :

Après avoir reçu 163 milliards de dollars du ministère des Finances, les banques américaines s’apprêtent à verser plus de la moitié de cette somme à leurs actionnaires dans les trois années qui viennent – et ce avec la bénédiction des pouvoirs publics.

Le gouvernement avait dit qu’il donnait aux banques de l’argent pour qu’elles puissent prêter davantage. La rémunération des actionnaires ne répond pas à cet objectif, mais on prétend au ministère qu’une suspension de la distribution trimestrielle des dividendes aurait dissuadé les institutions financières de souscrire à ce programme fondé sur le volontariat. De fait, les neuf premiers participants sont de grands établissements financiers – dont certains à court de capitaux –, qui se sont laissé convaincre début octobre par le Trésor d’y adhérer dans l’intérêt du pays.

Aujourd’hui, des économistes et des membres du Congrès protestent, se demandant pourquoi les établissements bancaires devraient recevoir de l’argent public s’ils en ont suffisamment pour verser des dividendes – ou, à l’inverse, pourquoi ceux qui ont besoin de l’aide du contribuable continuent à rémunérer autant leurs actionnaires. “Le but du programme est d’accroître les prêts et d’injecter des liquidités dans l’économie. Si l’argent est utilisé pour les dividendes, cela va à l’encontre de cet objectif”, s’offusque Charles Schumer, sénateur démocrate de New York.

Le Trésor se propose d’investir jusqu’à 250 milliards de dollars dans diverses banques américaines, en échange d’une participation à leur capital, à laquelle l’Etat fédéral renoncera une fois qu’il aura été remboursé. Les 33 établissements qui ont adhéré à ce jour comptent distribuer à leurs actionnaires près de 7 milliards de dollars ce trimestre. Si ce rythme se maintient, ces paiements absorberont 52 % de l’investissement du ministère pour les trois premières années du dispositif.Notre programme a été conçu de manière à inciter un grand nombre d’institutions à y adhérer, afin de consolider leur situation financière”, justifie Michele Davis, porte-parole du ministère. Cette approche s’oppose toutefois à celle adoptée par d’autres pays, notamment l’Allemagne et le Royaume-Uni, qui obligent les banques à cesser de rémunérer leurs actionnaires jusqu’à ce que l’Etat récupère sa mise. Le gouvernement américain avait lui-même imposé ce principe à Chrysler en 1979, comme condition de son renflouement.

Aujourd’hui, plusieurs institutions envisagent de distribuer plus de dividendes qu’elles n’obtiennent de fonds fédéraux. Ainsi, Bank of New York Mellon, qui a reçu 3 milliards de dollars, donnera 275 millions de dollars à ses actionnaires ce trimestre, plus 3,3 milliards de dollars au cours des trois prochaines années. |…]

Mais, selon divers analystes, ces banques auront de ce fait encore plus de difficultés à trouver de nouveaux investisseurs. Car, pour certains actionnaires, les dividendes sont une source de revenus réguliers ; pour d’autres, c’est un baromètre de la santé de l’entreprise. C’est pourquoi les sociétés tentent généralement de maintenir ou d’augmenter leurs versements chaque trimestre. Plusieurs des banques touchées par la crise avaient d’ailleurs réussi à le faire sans interruption depuis au moins trente ans.

Extrait de Binyamin Appelbaum – The Washington Post

Alors, on peut relire Thomas Jefferson :

thomas-jefferson Quand les subventions se muent en dividendes I believe that banking institutions are more dangerous to our liberties than standing armies. If the American people ever allow private banks to control the issue of their currency, first by inflation, then by deflation, the banks and corporations that will grow up around the banks will deprive the people of all property until their children wake-up homeless on the continent their fathers conquered.

Je pense que les institutions bancaires sont plus dangereuses pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat. Si le peuple américain permet un jour que des banques privées contrôlent leur monnaie, les banques et toutes les institutions qui fleuriront autour des banques priveront les gens de toute possession, d’abord par l’inflation, ensuite par la récession, jusqu’au jour où leurs enfants se réveilleront, sans maison et sans toit, sur la terre que leurs parents ont conquis.

Président Thomas Jefferson – 1802 – Lettre au Ministre des Finances, Albert Gallatin

Ou finalement se contenter d’une pensée d’Alan Greenspan, ancien président de la Réserve fédérale, la banque centrale des États-Unis, de 1987 à 2006 :

Je sais que vous croyez comprendre ce que vous pensez que j’ai dit, mais je ne suis pas sûr que vous réalisiez que ce que vous avez entendu n’est pas ce que je pense. – Alan Greenspan

luciditérester-digne Quand les subventions se muent en dividendes
Merci à Lasserpe – Visitez son site ! et à Maester – Visitez son site !

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