canard Laide au retour - façon Besson… Article dans l’excellent Canard enchaîné du mercredi 18 mars 2009.

 

Des sans-papiers qui osent rentrer tout seuls chez eux, sans laisser au ministère de l’Immigration le privilège de les expulser? Intolérable ! Heureusement, la police veille. Le 2 mars, sept Marocains qui voyageaient en car ont été arrêtés près de Perpignan, au moment où ils passaient la frontière espa­gnole pour rentrer en fourbes chez eux. Rebelote le 7 mars, avec dix autres travailleurs marocains chopés alors qu’ils filaient en douce … vers le Maroc.

Dans les Pyrénées-Orien­tales, c’est devenu un sport local : « La police attrape les sans papiers qui quittent le ter­ritoire pour gonfler le chiffre des expulsions », explique la Cimade, seule association pré­sente dans les centres de ré­tention.

Attrapés au vol, nos Marocains – qui ne faisaient que passer en France après être partis d’Italie! – ont eu droit à un traitement de choix.

Tirés hors du car manu mi­litari, la plupart n’ont pas pu prendre leurs valises. Et les bagages se sont volatilisés en chemin … « Le chauffeur a pro­posé de convoyer les bagages jusqu’au Maroc, explique sans rire le cabinet du ministre de l’Immigration Eric Besson. Les policiers n’auraient pas dû laisser faire. La règle est que les personnes gardent leurs af­faires avec elles.  »

Cerise sur la valise en carton, les dix Marocains interpellés le 7 mars ont eu droit à une « sale garde à vue », rapporte la Cimade : fouilles au corps et à nu, insultes, et des policiers qui, dans la soirée, ont mis un film porno à la télé, en poussant le son…

L’enquête ouverte après la plainte de la Cimade ne montre aucun mauvais traitement, affirme le cabinet Besson.

« D’ailleurs, on voit mal des fonctionnaires mettre un film porno avec tous les gens qui passent dans un commissariat. » Puisque c’est impensable, on n’ose y penser.

Depuis, nos Marocains ont rejoint le centre de rétention de Perpignan pour être ex­pulsés… en avion, via Paris. On touche au génie: à vouloir expulser tout ce qui passe, l’Etat se retrouve donc à payer les billets d’avion de sans-pa­piers qui, de leur plein gré, rentraient chez eux en car­ferry ! « Ces Marocains au­raient très bien pu s’arrêter en Espagne », rétorque le minis­tère de l’Immigration. Heu­reusement pour l’Espagne, la France expulse aussi les sans­-papiers des autres…

Dans la série, on vit une époque formidable, je vous renvoie sur le Blog de Maitre Eolas :

Le 24 novembre 2008, à 15h45, Monsieur Kurtishji, accompagné de deux policiers en civil, est venu chercher trois de ses quatre enfants (un scolarisé en primaire, deux en maternelle), en pleine classe, pour «un rendez-vous en préfecture», ont compris les enseignants.

«A 19h, on apprenait que la famille au complet était au centre de rétention de Lyon», rapporte une militante du Réseau éducation sans frontières de l’Isère. Prévenus, les permanents de la Cimade, seule association autorisée à entrer dans les centres de rétention, ont cherché les Kurtishji, sans succès. Dès le mardi matin, la famille avait été expulsée vers l’Allemagne, porte par laquelle elle était entrée en Europe.

[…]k%C3%A9pis CDG 22 : Des képis dans le préau

Était-ce à ce point urgent, le risque que cette famille reste malgré tout irrégulièrement en France était-il à ce point intolérable, pour faire débarquer des policiers au milieu de classes de maternelle ? L’élément de surprise s’imposait-il au point d’infliger ce spectacle à des marmots âgés entre 4 et 6 ans, de voir leur copain de classe partir entre deux policiers, comme un criminel, pour ne plus jamais revenir à l’école, sans même pouvoir lui dire au revoir ? C’est ça, qu’on apprend à nos enfants dès la maternelle ?

Avons-nous perdu la raison ?

Rebondissons donc sur le témoignage d’un professeur à Marciac :

Lundi 17 novembre 2008, 10h. 30, école des Métiers du Gers. Descente musclée de la gendarmerie dans les classes. Je fais cours quand, tout à coup, sans prévenir, font irruption dans le lieu clos de mon travail 4 gendarmes décidés, accompagnés d’un maître-chien affublé de son animal. Personne ne dit bonjour, personne ne se présente.

Sans préambule, le chien est lancé à travers la classe. Les élèves sont extrêmement surpris. Je pose des questions aux intrus, demande comment une telle démarche en ce lieu est possible. On ne me répond pas, j’insiste, on me fait comprendre qu’il vaut mieux que je me taise. Les jeunes sont choqués, l’ambiance est lourde, menaçante, j’ouvre une fenêtre qu’un gendarme, sans rien dire, referme immédiatement, péremptoirement. Le chien court partout, mord le sac d’un jeune à qui l’on demande de sortir, le chien bave sur les jambes d’un autre terrorisé, sur des casquettes, sur des vêtements. La bête semble détecter un produit suspect dans une poche, et là encore on demande à l’élève de sortir. Je veux intervenir une nouvelle fois, on m’impose le silence. Des sacs sont vidés dans le couloir, on fait ouvrir les portefeuilles, des allusions d’une ironie douteuse fusent. Ces intrusions auront lieu dans plus de dix classes et dureront plus d’une heure. Une trentaine d’élèves suspects sont envoyés dans une salle pour compléter la fouille. Certains sont obligés de se déchausser et d’enlever leurs chaussettes, l’un d’eux se retrouve en caleçon. Parmi les jeunes, il y a des mineurs. Dans une classe de BTS, le chien fait voler un sac, l’élève en ressort un ordinateur endommagé, on lui dit en riant qu’il peut toujours porter plainte. Ailleurs (atelier de menuiserie-charpente), on aligne les élèves devant le tableau. Aux dires des jeunes et du prof, le maître-chien lance : « Si vous bougez, il vous bouffe une artère et vous vous retrouvez à l’hosto ! »

Il y a des allées et venues incessantes dans les couloirs, une grande agitation, je vois un gendarme en poste devant les classes. J’apprendrais par la suite qu’aucun évènement particulier dans l’établissement ne justifiait une telle descente. La stupeur, l’effroi ont gagné les élèves. On leur dira le lendemain, dans les jours qui suivent qu’ils dramatisent. Ils m’interrogent une fois la troupe partie, je ne sais que dire, je reste sans voix. Aucune explication de la direction pour le moins très complaisante. Je comprends comment des gens ont pu jadis se laisser rafler et conduire à l’abattoir sans réagir : l’effet surprise laisse sans voix, l’effet surprise, indispensable pour mener à bien une action efficace, scie les jambes. Ensuite, dans la journée, je m’étonne de ne lire l’indignation que sur le visage de quelques collègues. On se sent un peu seul au bout du compte. Certains ont même trouvé l’intervention normale, d’autres souhaitable.

Je me dis qu’en 50 ans (dont 20 comme prof), je n’ai jamais vu ça. Que les choses empirent ces derniers temps, que des territoires jusque là protégés subissent l’assaut d’une idéologie dure. Ce qui m’a frappé, au-delà de l’aspect légal ou illégal de la démarche, c’est l’attitude des gendarmes : impolis, désagréables, menaçants, ironiques, agressifs, méprisants, sortant d’une classe de BTS froid-climatisation en disant : « Salut les filles ! » alors que, bien sûr il n’y a que des garçons, les félicitant d’avoir bien « caché leur came et abusé leur chien ». A vrai dire des marlous, de vrais durs n’auraient pas agi autrement.

C’est en France, dans une école, en 2008. Je me dis que ces gens-là, les gendarmes, devraient accompagner les gens, les soutenir, qu’ils devraient être des guides lucides et conscients. Au lieu de ça, investis d’un drôle de pouvoir, ils débarquent, on dirait des cow-boys, et terrorisent les jeunes…

Je ne vois pas ce que je pourrais ajouter de plus…

colleges+2 CDG 22 : Des képis dans le préauMerci à Troud

Oui, oui, chaque expulsion revient à 21 000 €, tout compris !

Cette estimation vient d’un dangereux gauchiste : Le sénateur UMP des Hautes Alpes Pierre Bernard-Reymond, de la Commission des Finances du Sénat.

Si, si, tout est là.

Donc, si vous avez bien suivi, pour chacun des 20 000 immigrés expulsés tous les ans, on dépense… plus que ce que gagne plus de 60 % des français en un an…

Mais comme c’est Sarko qui le veut….