Coïncidant avec le 60e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, une pétition intitulée Charte 08, en référence à la Charte 77 des dissidents tchèques, circule sur le Net chinois. Pékin, qui célèbre le 30e anniversaire du lancement des réformes par Deng Xiaoping, riposte par la prison.

À lire sur Rue89.com

La Charte 08, délibérément calquée sur l’action des dissidents de l’ex-bloc soviétique dans les années 70, avec Vaclav Havel en Tchécoslovaquie, Andreï Sakharov en URSS, et quelques autres dans les autres « républiques populaires », comprend dix-huit propositions destinées à conduire la Chine vers la démocratie.

Parmi ces propositions, certaines sont de cruels rappels des impasses du régime, comme la demande de ratification du Pacte des Nations unies pour les droits civils et politiques, que la Chine a signé pour satisfaire les pays occidentaux, mais n’a jamais ratifié. Jacques Chirac avait coutume de citer la signature de ce Pacte comme l’un des succès de la diplomatie discrète en faveur des droits de l’homme: il oubliait de dire qu’il n’avait jamais été mis en œuvre…

D’autres propositions sont plus radicales dans le contexte chinois, comme la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire, qui sont tous placés actuellement sous l’autorité du Parti communiste chinois. Cette idée avait été évoquée par les réformistes au sein même du Parti, mais écartée après la répression du Printemps de Pékin, en juin 1989.

Les signataires réclament également des élections libres avec pluralisme des partis politiques, idée encore impensable pour les actuels détenteurs du pouvoir, et qui a conduit en prison tous ceux qui l’ont réclamée avant les signataires de cette Charte.

Lire la charte 08 en français

Un lien vers l’excellente étude Papiers Libres d’Amnesty International sur la Chine

chine-211x300 Chine : le choc de la Charte 08

Sur ce thème, une video exclusive du NouvelObs.com : Le témoignage exceptionnel d’un moine tibétain arrêté

Voici un document exceptionnel : le témoignage à visage découvert d’Akhu Jigme, un moine tibétain du monastère de Labrang, arrêté le 22 mars dernier par la police armée chinoise qui le soupçonnait d’avoir participé aux protestations de mars. Il raconte devant la caméra comment il a été traîné dans une voiture en plein jour, comment il a été harcelé, questionné, torturé. Ses tortionnaires ne l’ont relâché que quand il s’est trouvé au seuil de la mort. Il a alors pu être soigné, aux frais de sa famille. Après son rétablissement, Akhu Jigme a enregistré ce témoignage vidéo posté sur Youtube et il a également donné une interview par téléphone aux journalistes de l’agence AP (l’interview aurait été réalisée le 12 septembre et publiée le 15). Acte de courage impressionnant, car Akhu Jigme se trouve toujours en Chine, caché en Amdo, cette région tibétaine rattachée à trois provinces chinoises. Selon Robbie Barnett, professeur à l’Université Columbia et le meilleur spécialiste des questions politiques du Tibet, « cette interview revêt une importance extrême, car il s’agit sans doute du premier Tibétain ordinaire à s’exprimer en son nom propre tout en se trouvant encore dans son pays. Le précédent témoignage de ce type remonte à 1994″. Deux personnes seulement qui ont osé témoigner à visage découvert en quatorze ans : de quoi donner la mesure de la terreur que le régime chinois fait régner au Tibet.

Comme les premiers signataires de la Charte 08 sont désormais en prison, je ne résiste pas au plaisir de remettre en conclusion la vidéo de Daniel Cohn-Bendit au parlement européen, face à Sarkozy :

Du 11 au 13 décembre 2008, l’Hôtel de Ville de Paris a accueilli le 9e sommet des prix Nobel de la Paix.

Trois jours de débats autour des droits humains, avec l’ancien président polonais Lech Walesa, la Franco-Colombienne Ingrid Betancourt ou encore l’Irlandais John Hume. Tous ont lancé une campagne internationale pour la libération d’Aung San Suu Kyi, Prix Nobel assignée à résidence par la junte birmane. Le chanteur Bono a reçu le prix du sommet 2008, vendredi 12 décembre, des mains de Bertrand Delanoë.

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Le sommet mondial des prix Nobel – Sophie Robichon/Mairie de Paris – Hôtel de Ville, le 12 décembre 2008.
Bertrand Delanoë, Walter Veltroni, ancien maire de Rome, Ingrid Betancourt, Bono, Thandiwe Chama,
Lech Walesa et Frederik Willem De Klerk, ancien président de l’Afrique du Sud,
lancent un appel pour la libération d’Aung San Suu Kyi.

Vous trouverez sur Wikipedia un long portrait de cette femme héroïque.

J’ai entendu parler de ce sommet de façon originale : Lancia est en effet partenaire du sommet, et a financé une publicité engagée, que j’ai trouvée très originale, et qui change des blondes aux gros seins que l’on voit habituellement dans les publicités pour automobiles – façon « ami gogo, lache-nous 30 000 € et tu auras la même sur le siège passager… ». Vous trouverez ici le communiqué de presse de Lancia, très intéressant, et je vous mets la publicité en question :

Il est partout !

Un fou sévit, hop, une loi ! Encore plus rapide que Lucky Luke pour dégainer son nouveau code pénal que l’encre de la dernière modification n’est même pas sèche… Et je ne parle même pas de gros mots comme décrets d’application – mais nous y reviendrons…

Jeune poignardé à Grenoble : Sarkozy annonce une réforme de l’HP

L’Elysée a annoncé, jeudi 13 novembre, que Nicolas Sarkozy a demandé aux ministres de l’Intérieur, de la Justice et de la Santé de lancer une réforme de l’hospitalisation psychiatrique, après la mort d’un étudiant poignardé mercredi par un homme échappé d’un hôpital à Grenoble, a annoncé l’Elysée.

Lors d’une réunion à l’Elysée avec Michèle Alliot-Marie, Rachida Dati et Roselyne Bachelot, le chef de l’Etat a demandé « aux trois ministres de préparer sans délai une réforme en profondeur du droit de l’hospitalisation psychiatrique », a indiqué la présidence dans un communiqué.

Cette réforme devra permettre de « mieux encadrer les sorties des établissements« , « améliorer la surveillance des patients susceptibles de représenter un danger pour autrui, dans le cadre notamment de la création d’un fichier national des hospitalisations d’office« , et « clarifier le partage des compétences administratives dans le pilotage de ces dossiers », ajoute l’Elysée.

Il a annoncé un projet de loi que devra préparer sa ministre de la Santé Roselyne Bachelot sur l’hospitalisation d’office. Mesure-phare: la sortie, même temporaire, des patients hospitalisés de force sera désormais soumise à l’approbation finale du préfet. « La décision, ce doit être l’Etat ou dans certains cas la justice, pas les experts« , [NDR Il peut y avoir une certaine logique, mais dit comme ça, cela me fait froid dans le dos, en rapport avec certains pays ou l’Etat a beaucoup décidé des internements, seul…] a-t-il jugé. Même si « l’avis des experts est indispensable », « je ne suis pas pour une société d’experts« , a-t-il lancé devant une centaine de professionnels de la psychiatrie qui ont manifesté une certaine désapprobation.

« Les malades potentiellement dangereux doivent être soumis à une surveillance particulière », « certains patients hospitalisés sans leur consentement seront équipés d’un dispositif de géolocalisation » capable de donner l’alerte en cas de fugue, a-t-il annoncé et des chambres d’isolement seront également aménagées.

Beaucoup de médecins ont marqué leur réticence face à l’accent mis sur la surveillance et les malades hospitalisés sous la contrainte. Le Pr Jean-Pierre Olié, chef de service hôpital Sainte-Anne de Paris, a jugé « surprenant » la surveillance du patient par GPS, qui relève selon lui de la « confusion entre délinquance et maladie ».

Plus tôt, le chef de l’Etat avait fait part de sa « consternation » devant la mort de l’étudiant et exprimé « sa sympathie très attristée aux parents et à l’entourage de la victime ».

Cet étudiant-chercheur d’une école d’ingénieur est décédé dans la soirée de mercredi, vers 22h45 au CHU de Grenoble qui l’avait admis dans un état critique, après qu’il eut reçu un coup de couteau dans le ventre. Ses blessures ont été provoquées par un homme de 56 ans qui s’était échappé d’un hôpital psychiatrique où il était placé d’office après des faits similaires.

L’équipe médicale de l’hôpital où était interné le déséquilibré, n’avait pourtant observé aucun signe laissant « présager qu’il allait commettre » de tels « actes », avait déclaré à RTL le directeur de l’hôpital de Saint-Egrève (Isère).

« Rien, en ce qui concerne l’équipe médicale, qui a observé ce patient ces derniers temps, ne laissait présager qu’il allait commettre des actes de la nature de ceux qui lui sont reprochés aujourd’hui », avait déclaré le directeur, Michel Gellion, peu avant le décès de l’étudiant.

« L’équipe médicale estimait qu’il y avait nécessité de le réhabiliter dans le sens où il faut le réhabituer à vivre dans la cité », avait-il poursuivi.

Mercredi, l’homme, qui souffrirait de schizophrénie, a fugué, pris un bus pour Grenoble, acheté un couteau avant de frapper le premier passant venu, un étudiant de 26 ans. Par le passé, il avait déjà commis trois agressions du même type, blessant grièvement trois personnes.

L’homme serait l’auteur de trois faits similaires par le passé, qui auraient abouti à son placement d’office en hôpital psychiatrique. En 1989, il a poignardé dans le ventre un clochard à Grenoble, en 1995 un autre passant dans la ville après s’être échappé de l’hôpital, puis en 2006 un résident d’une maison de retraite de Miribel-les-Echelles (Isère).

NOUVELOBS.COM

Clairement, l’acte est attroce. La réaction du personnel médical l’est aussi, qui s’étonne que ce malade ait récidivé une quatrième fois…

Les soins psychiatriques sont à l’évidence à reformer.

MAIS :

  1. pourquoi c’est toujours Sarko qui s’occupe de tout ?
  2. pourquoi c’est toujours suite à un fait divers qu’on veut traiter un problème ?
  3. a fortioti dans l’urgence ?
  4. et surtout, comment dire, rarement dans le sens d’une amélioration des libertés publiques (mais oui, ne pas se prendre un coup de couteau est aussi une sacrée liberté publique !)… ?

A l’occasion des 60 ans de la déclaration universelle des droits de l’homme, vous trouverez ici une longue interview de Robert Badinter au Nouvel Observateur.

Je retiens pour ma part ce paragraphe :

badinter Quelle "Patrie des droits de lhomme" ? N. O. – Et la France, est-elle un modèle en Europe ?

R. Badinter. – Non. On assiste à un rétrécissement du champ des libertés publiques qu’il s’agisse des fichiers, des pouvoirs d’enquête, de l’extension de la garde à vue, des multiples formes de surveillance et de contrôle.

Mais le plus préoccupant est la surpopulation dans les prisons françaises qui demeure «l’humiliation de la République», comme le disait un rapport parlementaire. C’est un problème national grave. Tout ce qui échappe au regard – les prisons, les centres de rétention, les dépôts, les locaux de garde à vue, en partie les hôpitaux psychiatriques – ne mobilise pas l’attention des citoyens. Alors qu’on va célébrer la «Déclaration universelle des droits de l’homme», il faudrait relire les passages concernant la dignité humaine.

Les présidents successifs de la République aiment à rappeler que la France est la patrie des droits de l’homme. La vérité historique est que la France est la patrie de la «Déclaration des droits de l’homme», ce qui n’est pas la même chose !

A nous de faire en sorte que la réalité soit conforme à la «Déclaration» !

Un excellent article du Canard enchainé du 10 décembre 2008 (Je vous rappelle qu’acheter le Canard enchainé est bon pour la démocratie)

Plus d’un demi-million de gardes à vue
Flics et gendarmes mettent au trou pour un oui ou pour un non. Sanction sans jugement ? Indice d’efficacité des services ? Les gardes à vue servent à tout, sous l’oeil indifférent des procureurs, qui ne contrôlent rien…

En cinq ans, le nombre des gardes à vue a augmenté de 54 % ! Résultat : 560 000 personnes mises à l’ombre. Elles ont ainsi eu le privilège de s’initier aux joies de cette exception française qui permet aux flics d’enfermer n’importe qui, si bon leur semble.

En 2003, après une rafale de bavures, Sarko, alors mi­nistre de l’Intérieur, s’était ému de la situation. Dans une instruction en date du 11 mars, il constatait que « trop souvent encore, les conditions dans lesquelles se déroulent les gardes à vue sont insatisfaisantes, en termes de respect de la dignité des personnes. Cette si­tuation n’est pas à l’honneur de notre pays. Elle n’est pas admissible dans la patrie des droits de l’homme ».

Sauf qu’il faut faire du chiffre. Le 2 février 2007, dans une note remise aux directeurs départementaux, le mi­nistère de l’Intérieur expliquait que le nouveau taux d’efficacité de l’activité policière serait dorénavant calculé en fonction du nombre de gardes à vue (GAV). Traduction immédiate, sous les casquettes : plus on met de clients au chaud, plus les chefs seront contents.

Une bonne « GAV » peut avoir d’autres vertus. Cou­vrir un début de bavure, par exemple. Il suffit d’accu­ser de rébellion, d’incitation à l’émeute ou d’outrage le clampin que l’on a un peu secoué, un jour de mauvaise humeur. Ça fait monter les statistiques, et ça défoule. Que du bonheur ! Les procédures pour « outrage » ont, elles aussi, explosé.

Pourtant, une garde à vue, selon le Code de procé­dure pénale (on l’avait oublié, celui-là), ne sert pas à faire reluire l’activité policière. Encore moins à punir, avant tout jugement, le malappris qui a manqué de dé­férence envers l’uniforme. C’est, en théorie, une mesure purement technique qui consiste à retenir de force une personne soupçonnée d’avoir commis une infrac­tion. Autrement dit, celui qui répond à une convoca­tion ne devrait jamais être placé en garde à vue. Pas plus que celui qui accepte de suivre gentiment la pa­trouille.

Tout cela doit naturellement se faire sous contrôle. De qui ? Des magistrats du parquet ! Le procureur, dit la loi, doit être informé « dès le début de la garde à vue ». Et il a le devoir de visiter régulièrement tous les lieux **où des personnes sont retenues. Mais que le flic de base se rassure : il s’agit d’un texte qui sert juste à amuser les étudiants en droit.

Le résultat est à la mesure de la vigilance de la jus­tice : voici donc, choisis parmi des milliers d’histoires, quelques échantillons de cet entrain policier au travail.

Brigitte Rossigneux et Dominique Simonnot

Gardes à vue musclées : il n’y a pas que les journalistes! Témoignages…

  • Le 31 juillet 2008, Sylvain Garrel, conseiller municipal Vert du XVIIIème arrondissement de Paris, convoqué au commissariat pour « affaire le concernant ».

    Je me pointe à 10 heures du matin. J’avais fait plusieurs demandes, en tant qu’élu, pour visiter les locaux et contrôler les conditions de garde à vue. Aucune ré­ponse. En arrivant, j’apprends que je suis… en garde à vue, en attendant d’être confronté à un témoin. Lors d’une manif contre un projet immobilier dans mon quartier, on m’aurait aperçu en train d’abimer une dalle de béton sur le chantier. J’ai toujours nié et je fais remarquer que c’est une mesure inutile : je suis venu spon­tanément et suis disposé à revenir à l’ar­rivée du témoin. Mais les policiers refu­sent de me lâcher. Les poulets ont accepté de passer un coup de fil à ma femme car j’étais censé aller chercher mon fils de 4 ans à l’école. Mon contradicteur a rappliqué à 19 heures. Je suis sorti à 21 heures. Depuis, plus aucune nouvelle de cette his­toire.

  • Le 20 août 2008, Jean-François de Lauzun, 58 ans.

    Je rentrais chez moi, à Versailles. Il était 19 h 30 et, comme c’était désert, j’ai tra­versé sans faire attention au feu. Une policière, très agressive, me fait remarquer que le petit bonhomme était rouge. Je passe mon chemin. Mais elle me rattrape et me demande mes papiers. Le contrôle d’identité s’éternise, avec consultation des fichiers centraux. Quelques personnes ob­servent la scène. Plusieurs d’entre elles prennent ma défense. Ce qui leur vaut d’être à leur tour contrôlées. Je finis par rentrer chez moi, croyant l’incident clos.

    Mais, à 22 h 15, on sonne.Fatigué, je me suis couché tôt. J’enfile une robe de chambre et me retrouve de­vant les policiers, qui ont une convocation pour moi. Je leur fais remarquer que ce n’est pas une heure pour venir chez les gens. J’ajoute que les proportions prises par cette histoire sont ridicules et évoque des « méthodes totalitaires ». On me si­gnifie alors que je suis en garde à vue. J’aurais « incité à l’émeute » lors du contrôle !

    Je suis menotté, emmené en py­jama, enfermé dans une cellule qui sent l’urine. Je comprends vite pourquoi. Par deux fois, on me refuse l’accès aux toilettes et je dois me soulager dans un coin. L’in­terrogatoire se passe avec une menotte at­tachée à la chaise. Je suis libéré dans l’après-midi.

    Depuis, j’y pense tout le temps. Je n’ai aucune nouvelle depuis trois mois.

  • Le 21 juillet, à Paris, Pierre Conley, 28 ans.

    Je prenais un verre avec ma petite amie suédoise au soleil couchant, après un pique-nique au square du Vert-Galant. Deux hommes surgissent de derrière un saule-pleureur. Je fumais une cigarette de tabac roulé. Ils me demandent si c’est un joint. Je leur réponds que je n’en fume jamais, mais, à ma grande surprise, ils exigent que je les suive pour un contrôle intégral. Très agres­sifs, ils me tirent, en me tordant le bras. Je prends peur et appelle au secours. Ils me plaquent au sol. J’ai l’impression qu’on m’étrangle. Leurs collègues déboulent. Je suis en règle mais ils décident de m’emme­ner au poste de la rue du Louvre, où l’on me menotte. Au bout d’une heure, je suis conduit au commissariat Saint-Honoré pour un éthylotest électronique. Taux d’alcoolémie négatif : 0,13 g !

    On me ramène rue du Louvre. Quand je demande si ça doit durer encore longtemps, on me répond : « Vous n’allez pas nous casser les couilles toutes les deux mi­nutes. » Après quatre heures de ce traitement, on enlève mes menottes. J’apprends que je suis accusé d’« incitation à l’émeute » pour avoir appelé au secours. J’ai écrit à l’IGS (Inspection générale des services). Pas de réponse. Et à Michèle Alliot-Marie, qui, elle, m’a assuré par courrier de « son entière détermination à intensifier toujours plus la formation des policiers, en parti­culier en matière de déontologie. »

  • Le 28 septembre, à Paris, Augusta, 53 ans.

    Vers midi, au métro Château-Rouge, les vendeuses à la sauvette criaient : « Maïs tso ! Maïs tso », au lieu de « chaud », et ça m’a fait rire. Je venais d’acheter un épi au KFC Ménilmontant. J’ai vu les filles cou­rir et trois policiers s’avancer « Vos papiers !» J’ai tendu ma carte d’identité fran­çaise. Ils voulaient voir mon sac. « Il est interdit d’acheter ce maïs ! – Pourquoi ? – C’est un délit. – Mais je l’ai acheté au ma­gasin. – Vous êtes en état d’arrestation ! », coupe une policière.

    J’ai discuté : « Bien que d’origine nigé­riane, je ne vends rien… Rendez-moi mes affaires. » Un policier m’a alors attrapée par le bras et envoyé deux coups de botte dans les jambes. J’ai chuté, ventre à terre, son genou appuyant sur mon dos. Je me suis débattue, mon pagne s’est ouvert, j’étais à moitié nue au milieu des badauds, qui criaient, sifflaient et filmaient. Les policiers leur ont lancé des lacrymos, même sur une femme et son bébé. Ils m’ont me­nottée, emmenée dans une cellule, au com­missariat du XVIIème.

    A 14 heures, une policière me demande si je sais lire. J’ai répondu qu’étant di­plômée de l’American University of Texas et de l’American University of Paris, oui, je savais lire et écrire… A 17 heures, l’avo­cate est arrivée et, une heure plus tard, on m’a amenée, menottée, à l’hôpital. Le médecin a constaté des hématomes. Le lendemain, à midi, un policier est venu me libérer à l’ hôpital. Je suis accusée d’« outrages et rébellion ». J’ai porté plainte.

Je reprendrais pour finir le commentaire de Sébastien Fontenelle sur son blog, sur le cas d’Augusta :

Je doute que Jean-Claude Magendie,  » premier président de la cour d’appel de Paris « , se précipitera pour demander  » toute précision utile sur les conditions qui  » auront  » entouré  » ton interpellation – comme il vient de faire pour Vittorio de Filippis .

De la même façon : je ne suis pas (du tout) certain que  » le président de tribunal de Paris, Jacques Degrandi « , lancera un (courageux) appel à respecter partout le  » principe constitutionnel de proportionnalité qui régit les mesures de contraintes  » – comme il a fait hier pour Vittorio de Filippis .

Je dirais que le récit d’Augusta est un peu énervant.

Je dirais que le récit d’Augusta est même plus énervant que le récit de Vittorio (de Filippis).

(Toutes choses égales, par ailleurs.)

Il a été, parmi d’autres, publié mercredi. En as-tu entendu parler, dans la presse qui s’est il y a dix jours levée pour Filippis ?

Ah ben non, tiens couillon : Augusta, je le crois, n’est pas si barbichue que sa mésaventure puisse mobiliser nos si preux journaleux.

20minutes.fr n’a que je sache rien publié sur l’histoire d’Augusta, interpellée, déshabillée, humiliée.

Étienne  » Figaro  » Mougeotte n’a pas hurlé (du tout) que le sort fait à Augusta était :  » Intolérable ! « 

J’ai lu 160.000 papiers sur l’ » affaire Filippis « .

J’ai lu un seul papier (celui du Le Canard enchaîné ) sur l’affaire Augusta.

Et je suis très sincèrement désolé pour Filippis – mais le compte n’y est pas, de sorte qu’il faudrait maintenant que les journaleux cessent de nous tenir pour des gro(sse)s con(ne)s, et de caqueter qu’ils ne réclament rien de particulier pour eux-mêmes, et de ululer que l’ » affaire Filippis  » est (tellement)  » symptomatique  » des malheurs du simple quidam.

Dans la vraie vie : c’est l’interpellation d’ » Augusta, 53 ans « , qui est symptomatique – pour ce qu’elle révèle (ou confirme) de coutumière tartuferie politico-médiatique.

L’ » affaire Filippis  » démontre une chose, et une seule : c’est que les coteries pressiques, si promptes à s’ériger en ligues de vertu outragées quand des flics osent rudoyer l’un des leurs, continuent de regarder ailleurs, quand les mêmes s’en prennent à qui n’est pas de leur (tout, tout, tout) petit monde.

Il y aura tout à l’heure d’autres Augusta – mais nos crânes défenseurs des droits du gardé à vue barbichu sont déjà retournés à l’indifférence des classes protégées : le système est ainsi conçu qu’ils ne s’en rendent même pas (tous) compte.

Merci donc au Canard !

Une commission chargée de réfléchir à la justice des mineurs préconise de fixer à 12 ans l’âge à partir duquel un enfant peut être pénalement responsable de ses actes.

Les jeunes délinquants pourraient aller en prison dès l’âge de 12 ans en France, selon le rapport d’une commission chargée de réfléchir à la justice des mineurs qui sera remis à la garde des sceaux le 3 décembre prochain.

Ce rapport, dont les principales conclusions sont publiées aujourd’hui dans La Croix et Le Parisien, a été rédigé par une commission de réflexion installée en avril par Rachida Dati pour réformer l’ordonnance de 1945 sur la justice des mineurs.

Selon La Croix, les membres de la commission, présidée par le professeur d’université André Varinard, se sont mis d’accord pour fixer à 12 ans l’âge à partir duquel un enfant peut être pénalement responsable de ses actes. Le système français actuel ne prévoit aucun âge, la responsabilité étant appréciée au cas par cas suivant le «discernement».
12+ans CDG 31 : La prison dès 12 ans? Cette proposition suscite déjà un début de polémique, la plupart des autres pays d’Europe ayant fixé l’âge de la responsabilité pénale au-delà de 14 ans. Certains membres de la commission, notamment des policiers, auraient préféré l’âge de 10 ans, croit savoir la Croix.
«Il est clair qu’on est dans cette politique du tout-pénal qui oublie complètement qu’un mineur peut être un délinquant, mais qu’il est surtout un être en construction. On ne peut pas dissocier la politique pénale de la politique éducative», a dit à Reuters la présidente du Syndicat de la Magistrature, Emmanuelle Perreux.
Et d’ajouter : «Les mineurs sont les mêmes qu’hier, ce qui change c’est le contexte économique et social. Ce discours ambiant qui consiste à dire que la délinquance des mineurs augmente est un faux discours.»

Sur le principe, les experts se prononcent pour l’impossibilité d’une incarcération d’un mineur de moins de 14 ans. «Sauf en matière criminelle», où l’emprisonnement pourrait être ordonné plus tôt, peut-être dès 12 ans.
Rappelons qu’actuellement, un mineur ne peut être incarcéré, en matière criminelle, qu’à partir de 13 ans.

12+ans+3 CDG 31 : La prison dès 12 ans?

La commission Varinard, composée de magistrats, d’éducateurs et de parlementaires, préconise également la création d’un «tribunal des mineurs à juge unique» pour juger «des délits pour lesquels la peine encourue est inférieure ou égale à 5 ans d’emprisonnement».

Toutefois, les mineurs comparaissant en détention provisoire, et ceux en récidive légale devront être «obligatoirement poursuivis devant la juridiction collégiale».
(Source AFP et Reuters)

12+ans+4 CDG 31 : La prison dès 12 ans? 12+ans+2 CDG 31 : La prison dès 12 ans?

Merci à Goubelle – Visitez son site !

L’amendement 138 est supprimé, Guy Bono promet son retour

Carton plein pour Christine Albanel : le Conseil européen des ministres Télécoms a décidé de supprimer l’amendement 138 qui mettait à mal le projet de suspension de l’abonnement Internet en cas de téléchargement illégal. Un texte pourtant approuvé par une large majorité du Parlement européen.

Christine Albanel l’avait promis aux sénateurs lors de l’introduction du projet Création et Internet : l’amendement 138 « a suscité beaucoup de réactions, car certains tentent d’instrumentaliser le débat pour bloquer la démarche française alors que le Paquet Télécom ne porte que sur les contenus. La France demandera qu’il ne figure pas dans le texte définitif ; sa portée ne serait d’ailleurs pas suffisante pour remettre en cause notre démarche. » Un texte paradoxal, sans portée mais qu’il fallait fusiller au plus vite tellement le bruit de ce fameux « 138 » pourrissait la démarche huilée de la rue de Valois.

Que dit cet amendement ? Il détaillait qu’« aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans décision préalable de l’autorité judiciaire en application notamment de l’article 11 de la charte des droits fondamentaux, sauf en cas de menace à la sécurité publique où la décision judiciaire peut intervenir postérieurement ».

Selon une interprétation largement admise, toute suspension d’abonnement internet dans le cadre de la riposte graduée exigeait l’intervention d’un juge. Or, la démarche rendait particulièrement compliqué la traque de masse organisée par le projet Création et Internet, qui préfère amplement les procédures expéditives (prévision de 10 000 emails par jour et 3 000 lettres recommandées).

Comme prévu, Guy Bono redéposera avec Daniel Cohn Bendit cet amendement en deuxième lecture au Parlement européen en 2009. Le bureau de Guy Bono nous promettait d’ailleurs que si Albanel n’avait pas compris la vraie portée de ce texte, la version II serait nettement plus percutante.