Chez Amazon.uk, des conditions de travail dignes de Zola

Semaines de sept jours, pénalités en cas d’arrêt maladie, cadences infernales, les salariés d’Amazon au Royaume-Uni subissent des conditions de travail impossibles à quelques semaines des fêtes, raconte une journaliste du Sunday Times, qui a réussi à se faire embaucher dans un centre d’envoi du géant de la vente en ligne.

D’après Vincent Delfau et lemonde.fr

esclave-travail CDG 28 : Amazon de non droit ?
Conditions de travail éprouvantes, cadences infernales, heures supplémentaires imposées, le tableau que dresse une journaliste britannique infiltrée dans un entrepôt d’Amazon est édifiant.

Les salariés d’Amazon resteront certainement dubitatifs en lisant les vers de Victor Hugo. Le poète, évoquant « le vrai travail, sain, fécond, généreux, qui fait le peuple libre et qui rend l’homme heureux », était à mille lieues de décrire les conditions dans lesquelles triment les manutentionnaires britanniques du géant de l’e-commerce, à en croire un article paru dimanche dans la presse britannique.

Après avoir passé sept jours en tant qu’intérimaire dans l’entrepôt d’Amazon situé à Bedfordshire, une journaliste du Sunday Times livre ainsi un tableau édifiant des conditions de travail imposées aux employés du VPCiste. Composée en grande partie de travailleurs étrangers, la main d’oeuvre est soumise à un rythme effréné.

Le reporter infiltré indique également que certains travailleurs parcourent l’équivalent de 22,5 kilomètres par jour dans l’entrepôt pour récupérer les produits afin de les emballer. Des objectifs de productivité exigeants sont établis, qui peuvent atteindre 140 produits à emballer par heure pour une console de jeux vidéo Xbox.

Sept jours de travail par semaine

Après cinq jours de travail en semaine, les employés doivent encore effectuer 10,5 heures de travail le week end. Au final, les salariés doivent donc être sur site les sept jours de la semaine. Et chaque journée de labeur n’est ponctuée que de deux pauses de 15 et 20 minutes. La journaliste infiltrée rapporte même que l’autorisation du supérieur hiérarchique est nécessaire pour pouvoir se rendre aux toilettes. L’encadrement ne manque en outre pas de rappeler aux salariés que des caméras les surveillent constamment. De plus, les manutentionnaires sont priés de parler anglais entre eux.

L’assiduité chez Amazon n’est évidemment pas optionnelle. Chaque employé dispose d’une sorte de permis à points, crédité de six unités. La moindre journée d’absence, même justifiée par un certificat médical, engendre la perte d’un point. Les retards se traduisent également par un malus. Et quand le total de points devient nul, le salarié est remercié. Parallèlement, Amazon tâche de motiver sa main d’oeuvre par un système de primes sur objectif. Il s’agit d’atteindre des niveaux de productivité décidés par l’encadrement – emballer un certain nombre de colis en un temps donné, par exemple – pour toucher un bonus de 39 €. Selon la journaliste, les objectifs sont purement inatteignables. Elle rapporte ainsi que, sur les 25 manutentionnaires évalués au cours d’une journée, un seul était parvenu à remplir son objectif. Malheureusement pour lui, la prime promise n’est accordée que si l’ensemble des membres d’une équipe remplissent leurs objectifs.

Des heures supplémentaires obligatoires

Pour gagner plus, les salariés peuvent compter sur les heures supplémentaires. Ici, explique la journaliste du Sunday Times, ces heures en plus ne sont pas facultatives : tous doivent se plier aux besoins de l’entreprise et les chefs d’équipe sont intransigeants, à l’image de celui qui ne « veut pas entendre d’excuse » de la part d’employés placés dans l’incapacité de travailler plus que les huit heures contractuelles.

Et pour corser le tout, à la fin d’une semaine de travail de 7 jours et une nuit, la paye s’élève péniblement à 7,50 euros horaires. Mais si l’employé veut rentrer chez lui en bus, il lui en coûtera 8,50 euros, Amazon n’assurant pas le transport de et jusqu’à son immense entrepôt situé dans une zone industielle du Bedfordshire.

amazon CDG 28 : Amazon de non droit ?Dans l’entrepôt d’Amazon UK du Bedfordshire © REUTERS

Interrogée par le journal britannique, la direction d’Amazon Europe tâche d’estomper la noirceur de ce tableau à charge. Elle explique que les conditions de travail éprouvantes n’ont pour autre but que de garantir la satisfaction de tous les clients. Elle dément par ailleurs que les primes d’objectif ne soient qu’exceptionnellement accordées : selon les hautes sphères d’Amazon, 85% des objectifs fixés sont atteints et donnent ainsi lieu au versement d’un bonus. En ce qui concerne les courtes pauses, leur durée aurait été raccourcie en collaboration avec les représentants du personnel pour diminuer de 30 minutes le temps de présence total des salariés au cours de la journée. Enfin, la majorité des intérimaires seraient volontaires pour un poste de permanent. C’est le signe, aux yeux de la direction, que les conditions de travail ne sont pas si terribles…

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